Anachroniques

31/07/2022

Boire du petit lait dans le sable, en déguster les saveurs, les savoirs

TAPIERO Galia, Un Tout Petit Grain de sable, illustrations de Marion Brand, éditions Kilowatt, 2022, 40 p. 11€

Cet album au beau papier et à la couverture cartonnée, album de petit format (14x18cm), est une perle, un grain de beauté éditoriale. L’autrice, Galia Tapiero, applique ici ce qu’Elisée Reclus a pu appliquer au ruisseau ou à la montagne, à savoir un récit géographique qui prend une dimension poétique sinon morale en ces temps de crise écologique majeure. Le récit documentaire est exact dans sa visée objective et sensible dans sa visée littéraire. Le personnage central est non pas le grain de sable mais la métamorphose de la montagne en sable. Nous pourrions dire qu’Un Tout Petit Grain de sable est un album de formation

Or, cette métamorphose est plus objectivement une genèse. Le sable est ainsi un héros que l’enfant lecteur va rencontrer en fin de parcours de l’album. Il se trouve ainsi confronté à l’idée du devenir concrétisée dans le grain de sable.

Les vingt doubles pages sont autant d’étapes que l’enfant est convié à scruter dans le détail des illustrations. En effet, l’album est minimaliste du point de vue du texte, et il faut observer, repérer, imaginer pour que l’histoire se fasse. Or, l’enfant spontanément établit un récit de ce qui le touche, de ce à quoi il est confronté. Il va donc s’appuyer sur les illustrations de Marion Brand réalisées par tablette graphique. Celles-ci épousent le minimalisme du texte, créant un univers de suggestions à partir de la stylisation qui émane des aplats et du jeu des tons bleu, orangé et violet. Les motifs figuratifs sont eux-mêmes exécutés avec un dessin simple. Le minimalisme a pour vertu d’initier l’enfant à l’observation des pages comme une propédeutique à la contemplation de la nature.

Le petit enfant, dès trois ans, à qui on lira le livre au début et qui, de par la sobriété textuelle pourra assez vite le lire par lui-même, seul, partira ainsi en voyage avec la roche pour reconnaître le grain de sable. Il s’agit donc d’un voyage analytique, mais peut-être les autrices lui offriront-elles plus tard un prochain voyage synthétique, qui le mènerait alors à la dune… Qui sait…

 

SEYDOU Véronique, Le Jour où Vicky Dillon Billon n’a pas bu son bol de lait, illustrations GEORGES Hélène, rouergue, 2022, 48 p., 16€80

Grâce à la littérature à destination de la jeunesse, le genre de l’album ne cesse de se diversifier, sortant largement du domaine de l’enfance tout en s’y rattachant obstinément. Ce genre est semble-t-il un domaine de liberté grande pour les créateurs et créatrices. Le Jour où Vicky Dillon Billon n’a pas bu son bol de lait ne viendra pas contredire cette remarque qui traite à la façon d’un western le sujet de la colère. Les deux créatrices ont choisi d’élaborer par le récit et la fiction imagée les traits propres à cette émotion : frustration, violence, ressentiment, vengeance, égoïsme, souffrance, impertinence… L’enfant est projeté dans un univers parallèle où son activité sensificatrice -son besoin de donner du sens- trouve libre cours à se rassasier, dans l’inouï de situations cocasses, drôles et tendres. Ici, nulle possibilité de défaire le dessin et le texte. Une poésie riante sourd de leur tissage indétricotable.

 

JUGLA Cécile et GUICHARD Jack, Le Lait, illustrations de Laurent SIMON, Nathan, 2022, 32 p. 7€95 ; JUGLA Cécile et GUICHARD Jack, Le Sable, illustrations de Laurent SIMON, Nathan, 2022, 32 p. 7€95.

Par une double page l’enfant se familiarise avec l’objet du livre (ici soit le lait soit le sable). Ensuite, dix expériences qui sont parfois des observations, sont proposées, lui permettant d’apprendre les caractéristiques de l’objet de l’analyse. Si on accompagne l’enfant, le livre peut être proposé à un lectorat assez jeune ; si l’enfant est seul, il en profitera vraiment à partir de 9 ans. C’est donc une collection qui couvre un large éventail du lectorat jeune. Il faut louer ce type d’ouvrages qui implique un apprentissage de la patience et qui fait l’éloge de la lenteur, deux qualités importantes de la démarche scientifique et deux garde-fous contre le dogme de l’utilitarisme et de la vitesse.

Philippe Geneste

24/07/2022

Dans la délicatesse de la trace

MELNIKOVA Dina, Soirée d’été, CotCotCot éditions, 2022, 32 p. 19€90

Le texte de Dina Melnikova prend vêture de prose poétique afin de mieux saisir les nappes mentales des pensées alanguies qui figurent une soirée d’été de la narratrice chez sa grand-mère. Ici, tout n’est que calme, douceur, rêverie désirée, énigme sollicitée, mystère entretenu. Mais c’est aussi, la description toute subjective d’un moment, un de ces moments de vie qui laisse trace en mémoire au vif du corps et de ses perceptions.

Le jeu du noir sur le blanc et ses quelques variantes de gris quasi crayonnées, ce jeu entraîne le jeune lectorat, mais en fait tout lecteur ou toute lectrice, dans le partage d’un état de bonheur. Il en fait sentir l’éphémérité et pourtant, tout autant, la robustesse mémorielle. Le travail éditorial, une nouvelle fois, par l’éditeur CotCotCot, exemplaire tant il est soigné, tant il épouse la poésie de l’œuvre, endosse la transmission de la délicatesse comme les premiers mots, « Les voilages au motif démodé », qui invitent au voyage intérieur.

Pointillés, traits, touches, l’œuvre dessinée se rapproche de la gravure, apportant au texte l’idée d’un creusement de traces dans le corps de la matière. Or, garder trace est au cœur de ce récit de l’éphémère temporalité d’un moment. Grâce aux dessins à l’encre de chine à la plume et au pinceau, la narratrice rend présente les sensations de la nature qui l’entoure. Ici, le travail plastique n’illustre pas, il se fond dans la voix narrative. Ainsi, la double page muette, 7 et 8, obtenue selon le procédé du monotype, correspond-elle à une modalisation verbale : le jeune lectorat partage l’état d’attention intriguée de la narratrice et, comme elle, devine plutôt qu’il ne discerne la source d’un bruissement dans les branches. Les deux pages qui suivent sont réalisées au fusain : le transfert du point de vue de la narratrice à celui du lecteur ou de la lectrice explique que ces derniers éprouvent un sentiment de curiosité, une sensation d’inquiétude ; l’impression vacillante pareille aux bords des traits réalisés au fusain, engage lectrice et lecteur dans l’envoûtement moelleux de l’univers tracé. Du point de vue de la créatrice, elle nous confiait : « J’ai voulu varier les techniques pour parler des différentes textures de la nature et nos perceptions d’elles ».

Les illustrations narrent un texte par ailleurs incitateur des illustrations. Mais au fil des pages la narration se mue en commentaire de l’illustration qui, dès lors, pilote la lecture. Par ce jeu subtil entre image et texte, l’expérience de l’interprétation s’offre au lectorat. Son expérience sensificatrice (de mise en signification) s’appuie alternativement sur la trace verbale et sur la trace figurée. La magie de l’album –c’est-à-dire sa rigoureuse composition– opère alors, entraînant vers les confins d’un imaginaire qui se déclare caractéristique de l’humain.

La thématique naturaliste sert le même propos. Dessin d’herbier, gravure de paysage, figurations sur-réalistes car si réalistes, imprègnent l’album d’où s’échappe, évanescente, une harmonie douce des êtres et de leur environnement. Au cours de ce moment conté, la narratrice réalise comme une conciliation tendre avec elle-même. Le site en est, par le truchement de l’espace des pages, son for intérieur, qui semble construit par ce que de la vie a su être retenu.

Dans les marges de l’interprétation, Soirée d’été se fait éloge de la lenteur en magnifiant l’attitude du faire attention. Soirée d’été c’est la patience créatrice d’un espace où souvenir et scène imaginée d’instant en instant se mêlent, hors du temps et pourtant au cœur du temps. Sommes-nous dans les coulisses d’une mémoire ou dans celles des rêves ? L’album nous introduit-il dans le moment d’une rêverie nourrie de mémoire ?

Philippe Geneste

17/07/2022

Avertissement d’incendie dans les consciences

FICHOU Bertrand, L’Épopée de la forêt en cent épisodes, illustré par NIKOL, Bayard jeunesse, 2022, 304 p. 19€90

Le livre est de beau format, propose des récits courts prenant pour personnages centraux, des animaux, des plantes, bref, tous les acteurs de la forêt. Il souligne, au fil des histoires naturelles, l’interdépendance de la faune, de la flore ; il met en avant l’équilibre incessamment renouvelé que réalise le temps évolutif qui échappe à nos consciences d’humains. Il s’appuie sur les connaissances scientifiques pour raconter l’œuvre coopérative des végétaux entre eux, « la fabuleuse intelligence du mycélium » notamment. Les insectes prolifèrent dans l’ouvrage.

Pour son écriture, Bertrand Fichu a choisi soit la forme documentaire soit la forme d’une fiction. Ainsi, le vingt-troisième épisode s’intitule « Dans La Forêt naissent les contes » et le vingt-deuxième « Au Commencement était l’arbre-monde ».

Les chapitres (cent) sont courts, aisément accessibles aux enfants bons lecteurs à partir de 9 ans et parfaitement adapté aux élèves de sixième et cinquième. L’unité du livre tient à ce que l’enchaînement des chapitres est étudié, même s’ils peuvent être lus, nous l’avons dit, isolément. Le livre peut être présenté aux enfants plus jeunes, mais il y faut la médiation de la lecture à voix haute par l’adulte. La lecture des cent épisodes assurera à l’enfant une connaissance approfondie de la vie cachée de la forêt.

Le travail illustratif est fouillé, très coloré, numérique et réaliste pour les figures représentées : « L’Épopée de la forêt en cent épisodes a été pour moi un grand laboratoire d’expérimentations » déclare Nikol dans le prière d’insérer de l’éditeur. Le cadrage cherche à capturer l’intérêt de l’enfant, l’image restant toujours en lien, en complément du texte. Mais elle fait aussi rêver l’enfant qui entre alors dans ces images reconstruites du monde. Les cartes illustrées du kit d’activité qui accompagne le livre (vingt fiches pour reconnaître les espèces, mais aussi pour réaliser un jeu d’observation, un herbier…) sont un complément vivant qui tient dans la poche lorsqu’on fait une balade en forêt. Un beau livre dans la tradition des livres documentaires et instructifs bénéficiant d’une rigoureuse rédaction.

 

ZURCHER Muriel, La Vie des arbres, illustrations de Laurent AUDOIN, Nathan, 2022, 32 p. 12€95

Ce volume de la collection KIDIDOC est une grande réussite. Les nombreuses animations (caches, languettes accordéons qui se déplient, déroulement de frises, fenêtres qui changent selon qu’actionne une page ronde insérée dans une autre page) ravissent le jeune lectorat. Il va parcourir sept chapitres : l’arbre est vivant ; le voyage des graines ; les vies cachées dans les arbres, autour, dessus et dessous ; la communication entre les arbres ou de la solidarité végétale ; la répartition géographique des arbres ; les dangers naturels ou non qui guettent les arbres ; la déforestation et les enjeux de la protection des forêts. Afin de créer une respiration entre la somme d’informations contenues, des pages montrent des activités humaines du monde entier en lien avec les arbres, l’utilisation sociale du bois.

 

GUILLET Martine, L’Ogre de barbarie, illustrations de Sophie LEBOT, Cipango, 2022, 32 p. 18€

L’album annonce dès le jeu de mot du titre la centralité que va tenir le langage dans l’histoire. Celle-ci est racontée à la manière d’un conte classique : un univers du merveilleux, la présence de personnages imaginaires et d’un roi, d’une reine et de leur fils le prince Igor. La narration est à la troisième personne. Mais quelques éléments structuraux du conte sont modifiés : le présent s’impose au début et surtout à la fin du livre, l’histoire intègre nombre de personnages issus d’autres contes, faisant de l’intertextualité un pilier du sens de l’histoire. De plus, l’autrice-ce-narratrice intervient plusieurs fois, par des modalisations soulignant que cette histoire est racontée aujourd’hui, loin des temps immémoriaux de l’âge des contes.

Comment le jeune prince, lecteur passionné, va-t-il convaincre l’ogre insatiable défricheur de forêt pour combler son appétit à respecter l’environnement végétal et comment, ainsi, l’équilibre idyllique de la situation initiale va-t-il être rétabli, ouvrant à une ère nouvelle… mais toujours gouvernée par un roi et une reine… Igor, lui, deviendra écrivain le soir, jardinier le jour. Prendre le temps de lire en suivant les illustrations fouillées et aquarellées de Sophie Lebot, oniriques autant qu’en parfaite symbiose avec le texte ouvrant au respect de la nature de Martine Guillet.

Philippe Geneste


10/07/2022

Un été à la page

Bayar Michèle, Finies les chatouilles, oskar, 2020, 88 p.

Dans une famille bourgeoise, père comédien, mère sans profession précisée, les vacances chez ses grands-parents maternels sont une institution.

L’héroïne, Maelys, et son frère Max, bouclent leurs bagages. Maelys se réjouit du stage de voiles où elle va retrouver Erwan, pour lequel elle éprouve des sentiments amoureux. Mais Maelys est inquiète ; elle appréhende ce séjour, car le grand-père est porté à la chatouiller et ça la dérange, mais n’ose trop rien dire

« j’ai trop honte, je voudrais que ça s’arrête » (p.10).

Et cela depuis l’âge de cinq ans, au moins. Son amie Jade, la pousse à refuser. Mais les parents, la grand-mère n’y voient que du feu. Quant au grand-père il abuse l’enfant depuis sa position d’adulte :

« ce sera notre petit secret » (p.12) lui dit-il

L’ouvrage scrute avec didactisme la situation intra-familiale. Il montre comment Maelys retrouve la confiance en elle grâce à l’aveu qu’elle fait à son amie proche, à son frère puis à ses parents, de la honte ressentie. L’ouvrage décrit et en même temps instruit. C’est le propre des ouvrages de fiction didactique qui réussissent à traiter des problèmes de société.

 

BONO Elsa de, Eli et le secret des dunes, éditions Ex Aequo, 2020, 122 p. 12€

Voici un premier roman, qui s’adresse aux enfants de 9 à 12 ans. Le ton fantastique verse dans l’heroïc fantasy, tout en s’apparentant à un conte d’initiation.

La thématique est d’actualité : l’humanité fait face à un désastre écologique, une croûte survenue du fond de l’océan, inconnue des scientifiques, menace de tuer toute vie marine et de s’étendre à la terre entière pour y détruire toute vie. C’est là qu’intervient le merveilleux, par le biais d’un enfant en proie aux angoisses écologiques et secrètement ami intime de l’océan. Des fées lui soufflent la mission à accomplir. Il s’y risquera, le récit prend alors la tonalité de l’heroïc fantasy. Les péripéties et épreuves se multiplient en des chapitres courts (cinq pages en moyenne).

Le dénouement arrive, heureux : l’imaginaire donne pouvoir de survie à la terre et porte à l’espérance une humanité rendue consciente des dangers écologiques qui la menacent.

 

Meysenbug Malwida von, Mémoires d’une idéaliste, édition présentée par Sandrine Fillipetti, Mercure de France, 2019, 700 p. 15,20€

Ces mémoires sont parues entre 1869 et 1876 et en 1900 en France. Une amitié liait Malwida Meysenbug à Nietzsche ; admiratrice de Wagner, elle côtoya Louis Blanc et Alexandre Herzen. Les Mémoires permettent de suivre l’itinéraire de cette féministe (1806-1903). Elle rompt avec son milieu aristocratique d’une province allemande, se rapproche du courant libéral de la première moitié du dix-neuvième siècle, mêlant à une sensibilité socialiste naissante un idéalisme dont elle ne se départ pas. En 1852, elle émigre à Londres et croise nombre d’exilés politiques du continent. Mémoires d’une idéaliste est ainsi un document historique où les réflexions pour l’émancipation féminine abondent. Écrites avec clarté, dans un style précis, la lecture en est facile.

 

HIRSCHING Nicolas de, JOLY Fanny, Qui a piqué les contrôles de français ? Casterman, 2017, 92 p. 12€

Vingt-trois élèves imaginaires ont écrit une rédaction dont le sujet était : « Vous passez un après-midi avec votre grand-mère. Racontez ». Le livre donne à lire ces rédactions, petit panorama sociologique et document scolaire, certes, fictif mais ô combien bien senti… On lit des tranches de vie et les corrections et annotations de l’enseignante. Les deux croisés, le sourire advient souvent et le rire éclate à plusieurs reprises. L’ouvrage est ainsi à la fois un exercice de style en terrain connu pour les collégiens, un recueil de nouvelles sur un même thème qui puisent dans leur vie ordinaire et un clin d’œil au genre du commentaire qui assure la ligne continue d’un humour taquin et parfois pinçant. Une grande réussite éditoriale.

 

Roy Didier & Oudeyer Pierre-Yves, Les Robots et l’intelligence artificielle, illustrations par Roland BAZART, Nathan, collection Questions ? réponses ! 2020, 32 p. 7€40

En trente-deux questions et bien plus de réponses, voici plein d’informations sur les robots et l’intelligence artificielle, sujet d’actualité s’il en est. Qu’en est-il du langage du robot ? Un robot comprend-il le langage humain ? La mémoire robotique menace-t-elle à terme la mémoire humaine bien moins efficace ? Un drone est-il un robot ? Où en sont les recherches sur l’intelligence artificielle ? L’ouvrage commence par décrire ce qu’est un robot et ce qu’est l’intelligence artificielle ; ses pages ont la préoccupation de permettre à l’enfant d’appréhender les explications à partir de son univers (le smartphone).

Les deux auteurs des textes sont chercheurs à l’Institut National de Recherche dédié aux sciences du Numérique. Aussi, leur livre passionne car il nous plonge dans une réalité que l’enfant croit connaitre mais qui en fait le dépasse largement. Tous les membres de la commission lisezjeunesse y ont trouvé un grand intérêt et le livre n’a cessé de circuler de main en main avec de nombreux échanges entre ses membres. Ajoutez à cela une iconographie précise, une mise en page très aérée, et vous avez une idée de cadeau assurée pour les enfants dès 9 ans, plus jeunes si on les accompagne dans la lecture.

 

HAREL Karine, D’où vient l’eau que je bois ? illustrations de Didier BALICEVIC, Tourbillon 2020, 32 p. 12€

L’éditeur conseille l’ouvrage dès quatre ans, cela nous semble un peu jeune. Six ans, nous semble un âge plus juste et avec un accompagnement d’un adulte. Mais le livre peut aussi bénéficier aux 8/12 ans tant les informations sont précises, les explications nombreuses et claires, avec une texture d’illustrations où alternent photographies et dessins. On y suit le parcours de l’eau, du pompage au robinet. C’est l’occasion pour l’enfant de découvrir le rapport que son corps entretient avec l’eau. Le livre décrit ensuite le travail des égoutiers, le fonctionnement d’une station d’épuration. La pollution de l’eau fait alors l’objet d’une double page explicative. Armé de ces connaissances, l’enfant retourne à la vie de l’eau, son cycle et ce pourquoi elle est si précieuse. Nuage, brouillard, nappe d’eau, neige, arc-en-ciel, rosée, grêle, sont alors étudiés. L’avant-dernière double page est consacrée à l’usage ordinaire de l’eau par l’enfant et la dernière propose une expérience du filtrage de l’eau.

Ce livre paru dans la collection mon premier exploradoc fait de la part de l’éditeur l’objet d’une nouvelle présentation, plus aérée que la mise en page de la première édition. L’enfant s’appuie sur des petits personnages dessinés pour interroger les images, aide précieuse pour l’adulte lisant le livre à l’enfant, aide indispensable pour les 8/11 ans lisant seuls le livre. Une excellente idée de cadeau.

Philippe Geneste

 

Fontenoy Maud, Les Océans un trésor à protéger, Flammarion, 2015, 32 p. 13€50

Cet ouvrage au format confortable (240x300 mm) traite du rôle de la mer dans le cycle de la vie, souligne les intérêts de l’eau pour les humains, rappelle la biodiversité des océans, de la mer et l’enjeu de sa préservation. Il décrit les récifs coralliens, les régions polaires, le littoral. L’ouvrage promeut enfin la fondation Maud Fontenoy… Adressé aux enfants de fin d’école élémentaire et pré-adolescents, le livre est clair. On regrettera le peu d’engagement social et politique qui aurait quand même pu venir expliciter les sources du danger que font courir les hommes aux milieux marins.

Commission Lisez jeunesse

 

BAUSSIER Sylvie, La Course au pôle Sud. Amundsen et Scott, oskar, 2020, 99p.

L’anglais, Robert Falcon Scott, en 1902, tente la conquête de l’Antarctique. Mais il va manquer de vivres et fera demi-tour à 800 kilomètres du pôle. En novembre 1911, Robert Scott lance une nouvelle expédition pour atteindre le pôle Sud. Le 18 janvier 1912, il découvre le drapeau norvégien planté sur le pôle. Scott et les quatre membres de son expédition qui l’accompagnaient (les six autres étaient restés en arrière) repartirent. Mais de faim et de froid, ils moururent tous les cinq.

C’est l’expédition de Roald Amundsen qui a précédé celle de Scott. Admundsen avait été devancé, pour la découverte du pôle Nord, par Peary. Il décida alors de se lancer dans la conquête du pôle Sud. La première fois, après son départ le 8 septembre 1911, il rebroussa chemin. Puis il repartit le 19 octobre et son expédition atteignit le pôle Sud le 14 décembre 1911.

Le livre de Baussier narre les deux expéditions. Le récit de quatre-vingt-quatre pages est alerte et très documenté, comme cette autrice nous y a habitué. Il est suivi d’un dossier informatif de dix pages consacrées à la découverte des deux pôles, en quatre parties : le mystère des pôles, la conquête du pôle Nord, la conquête du pôle Sud, les pôles aujourd’hui et demain. Une carte et des documents explicatifs sont inclus dans l’ouvrage, qu’on ne peut que recommander.

Commission Lisez jeunesse et Ph. G.

 

03/07/2022

Des livres d'expériences

POUVERREAU Sandrine, Le Guide des métiers de demain, illustrations de Walter GLASSOF, Bayard, 2021, 96 p. 12€90

En tout plus de quatre-vingt-dix métiers sont présentés avec un langage gouvernemental : les « secteurs les plus porteurs », les « métiers qui recrutent ». L’autrice détaille sept secteurs : la santé & le bien être, l’intelligence artificielle, le marketing-vente-finance-droit, les métiers de la data, communication et arts, industrie et bâtiment, développement durable. Un index permet au pré-adolescent et à l’adolescent de se repérer rapidement pour s’informer sur ces métiers. Sept métiers seulement concernent des titulaires d’un CAP et/ou BTS et/ou baccalauréat professionnel. La plupart des métiers sont ceux de cadres, soit, au fond, la petite, moyenne et grande bourgeoisie qui forment aussi la clientèle des livres destinés à la jeunesse. Ainsi une centaine de professions récentes sont répertoriées, analysées et le parcours pour y accéder. C’est un guide, un vrai guide.

 BARFIELD Mike, À toi la science ! traduction Baptiste Massa, Bayard jeunesse, 2021, 96 p. 12€90

Ce livre rassemble soixante expériences scientifiques à reproduire. Chacune s’appuie sur l’exposé d’une découverte d’un ou d’une scientifique : Darwin, Einstein, Herschel, Johnson, Théophraste, Purkyne, Lovelace, Somerville, Archimède, Al-Haytham, Leeuwenhoek, Rayligh, Bernoulli, les frères Wright, Audubon etc. Ces expériences concernent les êtres vivants, la biologie humaine, les matériaux, l’air, l’électricité et le magnétisme, la physique et les forces, la lumière, l’astronomie, les mathématiques. Un glossaire aide le lectorat à mémoriser les notions, un index permet de retrouver rapidement ce qu’on cherche, quatre pages récapitulent l’objet du livre qui est à la fois un documentaire et un livre pratique. Le choix de la bande dessinée comme vecteur permet à Barfield de simplifier l’abord du livre et d’y introduire une dose d’humour qui enlève toute sécheresse au propos.

OXLADE Chris, Construis ton système solaire, Gallimard jeunesse, 2021, 63 p. + matériel de construction, 19€95

Ce coffret promet de faire comprendre au lectorat de 8 à 12 ans comment s’est formé le système solaire. L’enfant découvre le soleil, les huit planètes du système. Il s’instruit sur les comètes, les astéroïdes, les planètes naines. Grâce au matériel l’enfant construit ce système. Nous avons trouvé formidable le coffret et toute notre commission a accroché à ce que propose le livre. Les plus grands nous ont aidé à comprendre les 63 pages d’informations sur l’espace.

Commission lisezjeunesse

 

Remue-ménage dans la maison, illustrations de Tiago AMERICO, éditions Tourbillon, 2022, 10 p. + éléments, 12€90

Le livre propose cinq décors, liés à la maison : salle de bain, cuisine, salon, chambre, buanderie, jardin. Une boîte collée au dos de la couverture comporte trente éléments détachés, meubles, personnages, que l’enfant va pouvoir inclure dans un décor et y faire circuler. Ainsi, va-t-il créer de nouvelles situations, variables selon les jours et les moments. Bien sûr, cette activité gagne à être accompagnée par les parents car l’interaction mènera l’enfant à verbaliser, à préciser ce qui est créé, donc à commencer à raisonner à partir des propositions même de l’enfant. Alors, ce livre pratique atteindra sa pleine efficacité éducative, sans compter le moment de complicité ainsi établi dans le jeu.

 

BIELINSKY Claudia, C’est qui qui ? éditions Bayard jeunesse, 2022, 22 p. 11€90

Le titre donne le ton de cet album-jeu destiné aux petits enfants. Sur chaque double page, une même figure dessinée (singe, chien, souris, lapin, luciole, grenouille, en variations diverses de postures et activités. Page de gauche, un court texte demande à l’enfant de trouver, sur la double page, le dessin correspondant à une posture seulement. Il ne s’agit pas de reconnaissance perceptive, à proprement parler, ni de correspondance de formes à réaliser ; il s’agit d’associer la variante de la figure signifiant un sentiment ou un comportement ou une émotion. C’est là qu’est l’astuce de ce bon petit ouvrage, aux grosses pages cartonnées, aux coins arrondis pour que le petit enfant ne se fasse pas mal. On pourrait parler d’un imagier de la dénotation voire de la connotation, chose nouvelle au fond. Là encore, le livre trouvera sa pleine efficience dans l’interaction que l’adulte stimulera avec l’enfant, tout en le guidant dans la démarche avant que, connaissant le livre, il ne s’adonne seul à la recherche des correspondances pages après pages.

 

EPARVIER Hervé, Les Trois Petits Cochons, illustrations de Paco SARDO, Tourbillon, 2022, 28 p. 8€90 ; EPARVIER Hervé, Le Petit Chaperon rouge, illustrations de Did CHOCOLATINE, Tourbillon, 2022, 28 p. 8€90

La nouvelle collection de chez Tourbillon, propose des albums-jeux pour « découvrir de façon ludique les contes classiques ». Le conte est découpé en neuf séquences événementielles. Pour chacune, le texte initial fait l’objet d’une réécriture simplificatrice visant la clarté et la simplicité. Les images sont joyeuses, riches sans être fouillées.

Ces deux premiers volumes relatant un conte comprenant un trajet dans l’espace, l’auteur et le dessinateur proposent une séquence de repérage du parcours de l’héroïne ou des héros que l’enfant lecteur va effectuer avec le doigt. Pour les autres séquences, il est proposé à l’enfant, par une halte ludique, de repérer des éléments de l’image, ce qui est à la fois une initiation à se rendre attentif au texte lu et à prendre le temps d’explorer l’illustration.

Un tel livre peut être lu à des enfants dès quatre ans ou bien offert à des enfants de 8 ans pour les amener à lire pour leur plaisir. La co-lecture adulte-enfant (de 4 à 7 ans) est recommandée afin de pousser l’enfant à scruter les doubles pages. L’adulte pourra alors, pour chaque double-page, poser d’autres questions entrant en échos avec le texte afin que l’enfant en enrichisse sa lecture-compréhension.

Philippe Geneste