Anachroniques

31/12/2016

De l’enfant et du livre jusqu’au ciel de 2017

aranda, Daniel (textes réunis par), L’Enfant et le livre, l’enfant dans le livre, L’Harmattan, 2012, 223 p. 21€50
Ces actes d’un colloque sont partis du constat que « tout se passe comme si l’enfant objet du  livre et l’enfant sujet du livre étaient deux notions distinctes mais indissociables ». Par exemple Eric Auriacombe montre, à travers Harry Potter et Peter Pan que « l’auteur adulte injecte des éléments infantiles dans la figure du héros qu’il élabore, produisant ainsi des fantasmes “prêts à porter” dont le lecteur enfant va tirer parti » (p.12). On trouve dans ce volume une étude sur le statut ambigu du Petit Nicolas, les figures d’Alice et de Zazie, l’analyse des trois petits cochons, une étude fouillée de Sa Majesté des Mouches de Golding et de L’Ecole emportée de Umezu, deux contributions passionnantes sur la littérature de jeunesse italienne et sur l’album en Suède, une analyse des romans préhistoriques. Tous les textes sont rigoureux et faciles d’accès.

aBeau Nathalie, Raconte-nous encore une histoire. Pourquoi lire 80 classiques du Père Castor ? Père Castor – Flammarion, 2016, 96 p, 15€
A la sortie de la première guerre mondiale, le monde éducatif connaît une certaine effervescence autour des interrogations pédagogiques autant qu’éducatives. Les manuels et livres proposés aux enfants apparaissent trop étroitement pesants d’idéologie et de moralisme, sauf quelques exceptions. Les années vingt vont voir éclore les pédagogies coopératives, celles des centres d’intérêts, des groupes de besoin, les pédagogies socialistes, la tradition des expériences libertaires, la république des enfants de Korczak, les recherches expérimentales de Montessori, le développement de la conception éducative de Dewey, la création d’écoles sous l’égide de Decroly, le départ fulgurant de la psychologie des enfants avec notamment Jean Piaget etc. C’est dans cette effervescence qu’un jeune éditeur, Paul Faucher (1898 - 1967) se lance dans des expérimentations éditoriales. Chez lui, la préoccupation éducative est déterminante. Il est très influencé par le pédagogue tchèque, Frantisek Bakule (1877-1957), sous l’égide des conceptions duquel il fonde en 1927, chez Flammarion, la collection éducation qui diffuse les travaux du courant de l’éducation nouvelle. Il trouve échos auprès des bibliothécaires qui font vivre les toutes récentes bibliothèques de prêt pour les enfants, mais aussi dans les revues syndicales et pédagogiques, comme L’école émancipée. En 1931, Paul Faucher lance une ligne éditoriale d’albums pour la petite enfance. Le département du Père castor, nom emprunté à la tradition des totems du scoutisme, chez Flammarion, est né. Il travaille avec deux artistes russes : Nathalie Parain et Fédor Rojankovsky. En 1941, il publiera Michka qui sera le best-seller de ces albums.
Comme le dit Nathalie Beau, les albums du Père Castor rassemblent des adaptations de contes classiques, des contes issus de la tradition populaire, des contes modernes, devenus aujourd’hui des classiques, des récits animaliers. L’autrice passe en revue quatre-vingt albums, elle en raconte l’histoire, en cerne la problématique, en livre des détails de création parfois, fait le lien avec d’autres albums. Autant dire que ce livre bellement édité est une ressource pour qui cherche à connaître la teneur des albums ou pour la personne qui veut étudier tel ou tel album. Ce qu’on peut regretter, c’est l’absence d’une bibliographie et l’absence d’un historique plus fourni qui aurait permis de mettre en perspective cette collection. L’index des auteurs des albums et celui des titres sont en revanche une aide intéressante pour les lecteurs qui souhaitent recouper les informations éparses égrenées de recension d’album en recension d’album. Un livre que toute bibliothèque et toute bibliothèque d’école ne manqueront pas de se procurer. Et les lecteurs et lectrices intéressé.e.s y trouveront matière à réfléchir sur une aventure éditoriale pionnière.

Cannat Guillaume, Le Ciel à l’œil nu. Mois par mois les plus beaux spectacles en 2017, Nathan, 2016, 144 p. 19€90
Voici le rendez-vous annuel des éditions Nathan, avec le ciel et les astronomes amateurs ou professionnels. Ce livre de vulgarisation scientifique, réalisé chaque année par le journaliste Guillaume Cannat, propose aux lecteurs de se repérer dans le ciel, de janvier à décembre 2017. Plus de soixante rendez-vous crépusculaires ou nocturnes entre les planètes, le soleil et la lune sont présentés avec un schéma détaillé, des conseils pour les observer. Avec ses nombreuses cartes, quelques cent cinquante illustrations, schémas photographiques, dessins, on ne peut nier l’intérêt d’un tel ouvrage à manier avec les enfants et à mettre dans les mains des adolescents. Surtout que des gros plans encyclopédiques permettent de découvrir ou redécouvrir les bases de l’observation des astres, un domaine sur lequel cette édition 2017 met plus particulièrement l’accent. Le tout est renforcé par les encadrés mythologiques, astrologiques et pratiques. Le début de l’ouvrage comprend un nouveau cahier qui réunit les informations utiles pour l’observation du ciel. Un site web est associé au livre qui apporte des informations complémentaires. 

Philippe Geneste

23/12/2016

Parce que c’est beau, un livre

Shireen Nadia, Le Manchot empereur, Milan, 2016, 10 p. 5€90 ; Shireen Nadia, Le Phoque, Milan, 2016, 10 p. 5€90 ; Shireen Nadia, Le Renard polaire, Milan, 2016, 10 p. 5€90 ; Shireen Nadia, L’Ours polaire, Milan, 2016, 10 p. 5€90 ;
Ces quatre ouvrages ouvrent une nouvelle collection chez Milan, « Animaux en forme ». La couverture épouse la forme stylisée de l’animal traité par l’album documentaire destiné aux tout petits. Le livre découpé est fait d’un carton doux au toucher. Une caractéristique des mœurs de l’animal fait l’objet de chaque double page et ce n’est qu’à la fin que le livre dévoile le nom désignant l’animal figuré. La nouveauté est surtout, ici, de faire par le format découpé un livre objet pour entrer dans la lecture.

Baylet Ella, Une Journée dans la savane, Gallimard jeunesse, 2016, 32 p. 13€50
Voici un album animalier documentaire qui met en récit la journée d’un lionceau. Dans un monde qui se veut apaisant pour l’enfant, la figure du lionceau qui tète sa mère permet d’évoquer un animal prédateur sans montrer la violence de la chasse et de la recherche des proies par la troupe des lions à laquelle il appartient. C’est un subterfuge intelligent, mais qui amoindrit la portée documentaire de l’album. Reste alors la fiction, avec ses belles pages illustrées, pleines de douceur, où on croise le gnou bleu, le galao à bec rouge, l’outarde kori, le zèbre, la spatule africaine, le phacochère, le Bucorve du sud, la girafe, l’ibis, l’oréotrague, l’écureuil de barbarie, le vervet, l’agama, le flamant nain, la pintade de Numidie, l’autruche, le buffle d’Afrique, la gazelle de Thomson, le lycaon, le babouin, le jabiru, le patas, la grue royale, le messager sagittaire, le marabout d’Afrique, le rollier à longs brins, le rhinocéros noir, le renard à oreilles de chauve-souris, le chacal à chabraque, le pangolin de Temminck, le caracal, le vautour charognard, la mangouste à queue blanche, la hyène rayée, la hyène tachetée, de grand-duc de Verreaux, la civette africaine, la roussette paillée, le calago du Sénégal, le cuib harnaché, le serval, le canard à bec jaune, le porc-épic à crête, l’oryctérope, le léopard, le lièvre de la savane, le pedete, le protèle. Evidemment, seule une exploration avec l’enfant peut l’amener à s’ouvrir à la variété des espèces. Le livre se fait alors livre d’observation, livre des désignations. La lecture accompagnée s’impose pour un tel album documentaire. Destiné aux enfants de 3/6 ans.

Baylet Ella, Une Journée en Antarctique, Gallimard jeunesse, 2016, 32 p. 13€50
Ce documentaire animalier à la forme du récit de vie d’un petit manchot Adélie femelle, vise à faire découvrir les animaux de la banquise en Antarctique : manchot empereur, goéland dominicain, chionis blanc, labbe de Mc Cormick, albatros à sourcil noir, pétrel géant, gorfou, manchot papou, albatros hurleur, pétrel antarctique, fulmar argenté, prion de la désolation, sterne couronnée, cormoran impérial, pétrel des neiges, manchot royal, damier du cap, manchot à jugulaire, ross scal, calmar verruqueux, marsouin à lunettes, baleine à bosse, phoque de Wendell, léopard des mers, éléphant de mer du sud, légine arctique, dauphin sablier, clamar des glaces, bérardie d’Arnaoux, dauphin sablier, baleine e Minke, calandre antarctique, phoque crabier, orque, krill antarctique, otarie à fourrure. Comme pour le précédent, la lecture se doit d’être accompagnée par l’adulte afin que l’album révèle toute sa richesse à l’enfant qui, ensuite, trouvera un plaisir renouvelé à chercher tous ces animaux.

Minne Nathalie, Le Petit Voleur de mots et autres histoires, Casterman, collection les albums, coffret de trois albums souples, 2015, 13€95                                de 4 à 8 ans
Les trois ouvrages qui composent ce coffret sont magnifiques. Ils nous parlent avec poésie, -une poésie graphique, plastique et picturale autant que littéraire-, de thèmes structurant la vie humaine : le temps, le langage, l’amitié.
L’intelligence de Nathalie Minne est de procéder, pour chaque fiction, par unité de temps, unité de lieu et unité d’action. On suit un personnage, aussi peu personnage que peut l’être une création plastique à forme humaine, mais si attachant !
La délicatesse de l’écriture, aux accents philosophiques, permet de tisser le récit en contrepoint d’un travail graphique hors pair. Certes les œuvres y perdent un peu en regard du format initial (17cm x 23 cm contre 28 x 36cm dans la première édition), mais elles y gagnent par la présence des trois ouvrages, les mettant ainsi en une perspective de cohérence narrative. Les paysages sont réalisés en empruntant aux effets d’un dessin géométrique, du collage, avec des couleurs rarement vives, et des surfaces grattées, griffées, offertes aux graffitis.
Nathalie Minne ne procède pas par contraste de couleurs, mais par contraste d’atmosphères, ce qui rend son œuvre graphique figurative, alors qu’elle ne l’est pas vraiment. Sur les grands tableaux qui forment les doubles pages, se sur-impriment parfois, toute une nébuleuse de dessins constellatoires minutieusement réalisés par pointillés blancs, sur fond noir ou sombre. Des motifs divers captivent l’œil, le menant de-ci de-là dans l’espace des pages offertes à la lecture. Les personnages sont géométriques, stylisés, naïfs. Ils évoluent dans un décor foisonnant.
Pourtant, par l’effet des couleurs et de la structure des dessins, de leurs compositions, les tableaux installent le calme voire un effet de vide spatial. C’est que Nathalie Minne travaille sur la suggestion plutôt que sur l’illustration. Par exemple, dans Le Petit voleur de temps, le dimanche, les deux enfants ne se verront pas, alors, les feuilles des arbres qui tombent prennent la forme de larmes, suggestion de la tristesse qui envahit le cœur de deux petits, et présente dans une partie seulement de la double page.

Makoso Jean-Pierre, Zoé, traductions Muän Mâ M’kayi, illustrations Shavon Hsiao-Fen Nawrocki, L’Harmattan, collection contes des 4 vents, 2015, 32 p. 9€50
Ce conte trilingue, français, vili, anglais, se présente sous la forme d’un chant accompagnant la danse de la guérison à laquelle s’adonnent les personnes âgées et sages, les ancêtres, et les guérisseurs et guérisseuses. La petite Zoé, cinq ans, va ainsi suivre  les adultes dans la forêt et va les surprendre s’adonnant à ce rite du Congo-Brazzaville. Ecrit avec rythme, le conte est illustré avec une grande sensibilité par Shavon Hsiao-Fen Nawrocki. Les peintures laissent transparaître un travail de matière sur les couleurs profondes. Ce qui apparaît comme des gouaches illumine certaines pages pendant que des onomatopées colorées répètent le sens du texte dans l’image ou la mise en page. Alliant gros plans et plans moyens avec quelques rares plans généraux, l’album permet aux jeunes lecteurs et lectrices d’épouser le point de vue de Zoé, cachée dans les feuillages. Alors que tous les personnages sont en mouvement, l’héroïne reste immobile, accueillant la mémoire d’un rite qui fomente son désir de grandir. Conte intergénérationnel, Zoé met la vieillesse au centre de la préoccupation enfantine, une vieillesse vue, non pas sous l’angle de la maladie, mais sous celle de la vie retrouvée, de la transmission des savoir-vivre des peuples bantou, langue parlée en Afrique centrale, au Congo-Brazzaville, au Congo-Kinshasa, au Gabon et en Angola. Cet album trilingue est une des plus belles réussites de cette collection, unique en son genre, de chez L’Harmattan.

Charton Ariane (textes choisis et présentés par), Le Goût de la Toscane, Paris, Mercure de France, 2016, 114 p. 7,80€
Florence, Porte Vichio, Tour de Pise, Piazza del Campo, un paysage nourri de représentations de la Renaissance, plaines et vallées, l’Ecole siennoise du XIIIème au XVème siècle, un espace de dialogue entre les couleurs. La Toscane, c’est aussi Malaparte, Dante, on y entend les voix de Dumas, Barrès, Larbaud, Bourget, Gracq, Butor, Duras,  surtout, … Le livre est découpé ainsi : les paysages, la ville toscane (une anthologie où se croisent le président Charles de Brosse, Montaigne, d’Annunzio, Michelet, Stendhal, Berlioz, Gautier…), l’être toscan où l’art, la langue, et les caractères sont convoqués, entre « décor étrange de silence, d’eau et de pierres » et le « bondissement de vie » (Camus).

Macleod Robert, Le Monde des Vikings, Gallimard jeunesse, 2016, 80 p ; 19€95
Voici un somptueux ouvrage de grand format (270 x 304). L’auteur s’implique dans le documentaire en partant de sa lignée familiale. Le récit et les présentations incluent, nous dit l’auteur, des extraits du journal du grand-père, passionné par l’histoire des vikings. Tout commence avec une chronologie et une carte de la terre des vikings, auxquelles on se réfère régulièrement au cours de la lecture. Ensuite vient un foisonnant documentaire qui nous renseigne sur l’histoire de ce peuple multiple, et sur les sources qui nous permettent de l’approcher avec instruction. Bien sûr, ce sont leurs explorations hors de leurs terres qui cumulent un grand nombre de pages. On entre alors dans le mode de vie, au cœur des mœurs, le tout entrecoupé de portraits de personnages clés. Macleod fait aussi une part importante aux mythes, légendes et traditions qui aident le lectorat à sortir des représentations convenues et figées –les raids sur les côtes britanniques et celles de la France carolingienne– pour s’interroger sur l’histoire même de l’Occident. Un livre instructif bénéficiant d’un travail éditorial qui le valorise. 

Philippe Geneste

18/12/2016

Le livre est un cadeau

La Grande encyclopédie visuelle, Gallimard jeunesse, collection Les yeux de la découverte, 2016, 360 p. 24€95
L’ouvrage est d’abord un magnifique objet de beau format (254x306) qui traverse tous les domaines de la connaissance, organisé en un classement thématique et avec un index qui rendent aisée toute recherche. C’est une encyclopédie visuelle parce qu’elle repose sur 10 000 images, schémas et cartes assortis de légendes explicatives ou informatives. Elle procède par planches, qui fourmillent d’observations et d’informations savamment réparties dans le légendage. Chaque double page propose un domaine de savoirs. Cent cinquante planches thématiques sont classées en six grands chapitres : science et technologie, nature, géographie, culture, sport, histoire. L’essentiel des informations est donné par des infographies, dessins en coupe, chronologies, biographies. Qu’une telle somme soit accessible à 24€95 est aussi à souligner. C’est un sommet de cette collection, qui fait du savoir la centralité de la connaissance du monde, des autres et de soi. Ce volume est un point d’orgue eu égard à la collection où il paraît et qui s’adresse aux enfants à partir de 9 ans.

Blain Christophe, Les Deux Arbres, Casterman, 2016, 32 p., 13€95
Cet album est illustré par des peintures à couleurs chaudes. Avec leurs traits de contour prononcés et ostensiblement présents sous la couleur qui les déborde, les dessins sont stylisés mais, pour les enfants,  immédiatement accessibles. Le format italien rend la lecture confortable dès trois ans.
Cet album est paru en 1997, sa réédition rencontre l’actualité tragique d’une terre qui se hérisse de murs séparateurs des peuples, de murs qui brisent les liens humains. C’est exactement l’histoire de ces deux arbres, un grand et un petit ; un petit qui deviendra grand, que le hasard de la propriété chez les êtres humains va séparer de l’autre par un mur. Mais, par leurs branches et leurs feuillages, tous deux vont déjouer la séparation et ils se rencontreront de nouveau, par-dessus le mur, rassemblant tout un peuple d’animaux, accueillant une vie d’harmonie. Cette allégorie des temps modernes est à faire lire et relire aux enfants.

Corr Christopher, La petite maison de bois, Gallimard jeunesse, 2016, 40 p. 14€
L’ouvrage, par son titre, fait un clin d’œil à un roman classique de la littérature de jeunesse (La Petite maison dans la prairie de Laura Ingalls Wilder), mais c’est plutôt aux Musiciens de Brême qu’il doit être rapproché ou encore à Michka. C’est une ode à la solidarité qui se détermine par le partage d’un lieu. La maison, espace commun, rend chaque animal plus fort, plus vif, suscite chez chacun plus d’interrogation d’agilité d’esprit. La réciprocité est interrogée, au cœur de ce partage du lieu à soi qui repousse le terme de propriété. Faire confiance aux pairs et aux autres c’est leur permettre de s’enrichir de soi, de son espace, mais aussi les insérer dans l’intérêt commun d’une vie de groupe qui devient vie du groupe. De l’intérêt à on passe à la coopération pour. L’amitié n’a donc rien de spontané ou d’inné, c’est une construction en complicité, c’est le fruit d’une culture où la confiance (principe de la réciprocité) renforce les liens de solidarité portés par la coopération (principe de l’action). Ce livre au style psychédélique naïf porte un sens peu commun en littérature de jeunesse, en laissant se dérouler jusqu’au bout le  récit sur ses seuls ressorts initiaux.

Berri Juan, Mercredi, traduit de l’espagnol Amaia Garmendia, Steinkis, 2016, 128 p. 15€
Voici une très belle œuvre graphique pour les 9/15 ans. L’histoire repose sur la figure de la contigüité des événements et sur la mise en abyme des péripéties. Elle débute au matin, sur une ville dans laquelle le lecteur va pénétrer et se termine le soir, dans la même ville. Entre temps se passe la fiction qui enchaîne, avec un vraisemblable sans logique, des actions tonitruantes pleines d’humour. Au début, la succession des récits est motivée mais, très vite, finit par se créer des récits alternatifs articulés par leur seul moment de passage à l’intérieur du récit premier. On a alors l’impression d’un chassé-croisé joyeux et nonsensique. L’adhésion des lectrices et lecteurs est assurée par la présence de personnages du peuple évoluant à l’intérieur d’un univers quotidien. Bien qu’en couleur, l’album reste minimaliste et volontairement proche des personnages. Cette bande dessinée propose ainsi une réflexion sur la vie, hissant les banalités du quotidien et des routines au rang d’événements passionnants parce qu’œuvre de l’humain.

Vecchini Sylvia, Gaspard et Berlongot. L’endroit rêvé, dessins de Sualzo, Jungle jeunesse, 2016, 40 p. 9€95
Jungle et Steinkis se lancent dans la BD destinée à la jeunesse. Gaspard et Berlongot est une fable animalière humoristique. L’histoire procède par un développement cumulatif de récits, selon un enchaînement porté par le hasard. Chaque histoire s’ancre dans la précédente, d’où l’effet d’accumulation assez arbitrairement motivé par la structure elle-même. L’effet de sens est drôle mais la fiction rencontre une composante du monde enfantin, celui du désir d’un monde rêvé, immédiatement accessible. La littérature comble ce désir, pour le plus grand plaisir du tout jeune lectorat.

Dawey Owen, Requins, Gallimard jeunesse, 40 p. 14€90
Owen Dawey est l’illustrateur de ce très bel ouvrage. Il est spécialisé dans une illustration un peu ancienne, vintage, qui sied particulièrement à ce qui relève de la présentation naturaliste de la vie des animaux. Ici, ce sont les espèces de requins qui sont détaillées. On sait que le Sri Lanka, les îles Maldives et les îles Fidji demandent une restriction commerciale face à la surpêche de requins. Ils sont cent millions à être tués chaque année. A cela s’ajoute la destruction progressive de leur habitat naturel. On estime à un quart des espèces menacées, raies et requins confondus…
Aussi, cet ouvrage tombe à merveille, pour attirer l’attention sur la variété des espèces. Cinq cents sont connues. Le livre en présente pas mal : requin-bouledogue, requin aveugle des roches, requin dormeur nekozame, ange de mer de sable, requin-scie à long nez, requin marteau… les petits et les gros, défilent au fil des pages en papier recyclé. Le poisson pilote et le rémora, qui servent au requin pour lui enlever des parasites et vivent donc en symbiose avec lui, sont aussi approchés. Les mécanismes de la reproduction, ceux de l’alimentation sont évidemment présents. Une double page évoque des histoires de requins fameuses ou traditionnelles, alors que la fin du livre est consacrée aux risques d’extinction de certaines espèces. Un index des 49 espèces présentées clôt l’ouvrage excellent et d’un soin éditorial qui en fera un beau livre cadeau.

Philippe Geneste  

11/12/2016

Un rêve ésotérique d’immortalité

NOËL, Alyson, Eternels. Tome 1 : Evermore, Michel Lafon poche, 363 pages, 7 euros.

            Ever est une adolescente comme les autres… Ou presque. En effet, depuis l'accident de voiture où ses parents et sa petite sœur de douze ans, Riley, ont trouvé la mort, il lui arrive des phénomènes étranges. Lors de l'accident, Ever aurait vécu selon les médecins une « EMI » ou Expérience de Mort Imminente. Depuis, Ever ne peut plus avoir de contacts physiques avec une personne sans ressentir intensément ses émotions, ses peines… Elle lit également les pensées des gens et voit leur aura, c'est-à-dire un halo de lumière coloré émanant d'eux. Chaque couleur désigne un ou plusieurs états d'esprit particulier (par exemple, le violet représente la pensée, la sagesse ou encore l'intuition). Au début du livre, la signification de la couleur des différentes auras est donnée. Le problème est qu'Ever ne contrôle pas ce don et qu'elle entend constamment les pensées d'autrui, quitte à en être submergée. Mais ce n'est pas tout. Ever voit également des personnes décédées qui sont « coincées » sur Terre (ce qui n'est pas le cas de ses parents qui sont « de l'autre côté », c'est-à-dire dans le monde réservés aux défunts et qu'elle ne peut donc pas voir) Mais elle ne communique qu'avec l'une d'entre elles : sa petite sœur, Riley. Cette dernière apparaît et disparaît à sa guise pour parler à sa sœur et a la faculté d'aller où bon lui semble sans que les gens non extralucides ne la voient.

            Devenue orpheline, Ever part vivre avec sa tante, Sabine, en Californie. Cette dernière est avocate et n'a pas hésité à déménager lors du décès de son frère pour offrir à sa nièce un cadre de vie luxueux. Dans son nouveau lycée, Ever, qui était auparavant une jeune fille sûre d'elle et entourée d'amis populaires, semble se renfermer sur elle-même. En réalité, elle ne cherche qu'à se protéger des contacts avec les autres. Elle a malgré cela deux amis : Miles, un garçon homosexuel, et Haven, une jeune fille gothique qui est elle aussi en souffrance à cause de l'indifférence de ses parents à son égard.

            Et, dans cette vie déjà compliquée, l'arrivée d'un nouvel élève va bouleverser Ever. Il s'agit de Damen, un garçon très beau et brillant. A son contact, Ever parvient à ne plus être submergée par les pensées d'autrui mais elle n’arrive pas à lire en lui, ce qui ne fait que renforcer le côté mystérieux du jeune homme. Lors d'une soirée Halloween organisée par Sabine, alors que Riley (que personne d'autre que sa sœur ne peut normalement voir) rencontre une voyante, Ava (amie de Sabine), Damen et Ever se rapprochent et sortent ensemble. Ce rapprochement va instaurer une distance entre Ever et Haven, alors elle aussi un peu amoureuse de Damen. Au fil des jours, les deux amies se réconcilient mais cela n'empêche pas Haven d'être sous l'influence de Drina, une amie de Damen qui se comporte d'une manière étrange. Haven l'admire au point de s'habiller comme elle, de se teindre les cheveux en roux (comme Drina) et, détail important pour la suite, de se faire un tatouage au poignet. Ses amis se rendent bien compte de l’influence négative de Drina sur Haven, mais ne parviennent pas à la raisonner.

            Quant à Ever, sa relation amoureuse se heurte vite à de nombreux soucis dus à l'attitude profondément mystérieuse de Damen. En effet, ce dernier disparaît sans prévenir et lui donne très peu de détails sur sa famille… Etant « émancipé », Damen n'a donc pas de parents présents avec lui et Ever ignore où il habite. Afin de se rendre chez lui, elle va demander à sa petite sœur de l’aider. Cette dernière s’exécute. Cependant elle met Ever en garde : elle craint Damen et le croit même dangereux. Au point qu'elle refuse de l'accompagner. C'est donc seule qu'Ever se rend chez Damen, en douce.

            L'histoire prend alors un tournant particulier. Chez le jeune homme, Ever découvre une pièce contenant des objets anciens, des portraits de lui de plusieurs époques différentes… Et alors qu'elle s'apprête à repartir, elle surprend Damen, ensanglanté, avec Haven inconsciente. Au chapitre suivant, Ever a oublié cet épisode mais ressent, sans pouvoir se l'expliquer, de la méfiance envers Damen, qui est toujours son petit ami. Mais la mémoire lui revient rapidement et le jeune homme est obligé de lui avouer la vérité : il est un immortel aux multiples pouvoirs (il est extralucide, peut se déplacer très vite et stoppe même le temps !), tout comme Drina. Il essayait d'aider Haven dont le poignet s'infectait à cause du tatouage. En outre, c'est lui qui a sauvé la vie d'Ever lors de l'accident de voiture. Mais suite à cette révélation, Ever est loin de ressentir de la reconnaissance à son égard. Au contraire, elle ne comprend pas pourquoi il lui a caché la vérité, pourquoi il l'a sauvée alors qu'elle se sent responsable de l'accident et qu'elle se retrouve dotée de ce don étrange, qui est la cause de son isolement. Le couple rompt à ce moment là et Damen disparaît.

            Afin de se changer les idées, Ever accepte l’invitation de ses amis Miles et Haven de se rendre au festival du Winter Fantasy. Pourtant, depuis le départ de Damen, elle est à nouveau submergée par les émotions d’autrui, au point d’en avoir mal à la tête. Alors qu’elle se promène au festival avec ses amis, Ever croise Ava (la voyante) par hasard. Cette dernière lui propose son aide pour contrôler ce flux incessant de pensées mais Ever, méfiante, la refuse et rejoint ses amis. Haven verse alors de l’alcool à Miles et elle. Et là, c’est le soulagement pour Ever car, en effet, l’alcool bloque ses pouvoirs et elle se sent à nouveau normale.

            Malheureusement, les jours suivants, elle ne peut plus s’en passer. Cette accoutumance lui nuit aussi dans la vie sociale. Ainsi une fille méchante de la classe diffuse-t-elle sur les réseaux sociaux une photo d’Ever une bouteille à la main, provoquant son exclusion, temporaire, du lycée.

            Elle va pourtant continuer à boire en cachette. Mais si l'alcool lui permet de bloquer son don, reposant ainsi provisoirement son esprit, il l'affaiblit également. En effet, à son réveil, Ever croit que Damen lui a rendu visite en mettant en évidence un tableau la représentant dans un canyon sombre. Elle décide alors brusquement de s'y rendre. Mais il s'agit en fait d'un piège de Drina. En effet, les deux filles se retrouvent seules dans le canyon. Il s'agit là d'un épisode important parce que Drina va apporter d'autres éclaircissements. Etant, comme Damen, une « éternelle », elle est très amoureuse de ce dernier (et a même été mariée avec lui autrefois!). Mais, à des époques différentes, le même schéma se reproduit : Damen tombe amoureux d'Ever, ou plutôt d'autres réincarnations d'Ever. Et Drina finit, à chaque fois, par tuer la réincarnation parce que, systématiquement, la jeune femme ne se souvient de rien. Et, en l’occurrence, Drina veut à nouveau assassiner Ever ! Elle est sur le point de réussir lorsqu' Ever se met à penser très fort à ses parents et aux moments de bonheur partagés. L'amour qui l'envahit alors lui permet de guérir d'un coup de ses blessures. Drina reste estomaquée et Ever… disparaît.

            En effet, Damen, à distance, a senti le danger couru par sa bien-aimée et lui a envoyé (par le biais d'une sorte de voile lumineux) un moyen de se téléporter dans un endroit très particulier qu'il nomme l'« Eté perpétuel ». Il s'agit d'un lieu idyllique, d'une autre dimension, où Ever peut transformer la matière à sa guise. Damen explique à Ever qu'elle a guéri grâce au sentiment de bonheur qui l'a submergée (alors qu'après l'accident de voiture elle ne ressentait que colère et culpabilité. Elle ne pouvait donc pas guérir). Le jeune homme veut continuer à garder ses distances pour qu'Ever réfléchisse à ce qu'elle veut vraiment : être ou non une immortelle.

            Deux mois plus tard, le jour de la Saint Valentin, alors qu'elle surprend sa petite sœur esseulée sur le canapé, Ever se rend compte qu'Ava, dont elle a finit par accepter l'aide, avait raison. Riley erre, sans but précis, dans ce monde alors qu'elle pourrait être avec leurs parents dans le monde des esprits. Ever insiste pour que sa petite sœur parte « de l'autre côté » pour les rejoindre, même si cela lui brise le cœur. Le dialogue qui suit entre les deux sœurs est assez émouvant, puisqu'elles ne veulent pas réellement se quitter mais il le faut pour que Riley soit à sa place et puisse être heureuse.

            A la fin du livre, Ever se fait de nouveau attaquer par Drina, qui arrive à lire en elle malgré le bouclier mental qu'Ava l'a aidée à se forger. Mais elle parvient à la tuer en lui donnant un coup de poing dans le cœur, l'un des sept « chakras » du corps où loge l'amour. Mais Drina étant devenue une femme haineuse obsédée par la vengeance, l'amour est ce qui lui fait défaut. C'est en tout cas l'explication donnée par Damen, qui se matérialise auprès d'Ever tandis que Drina meurt. Les immortels ne le sont en fait pas totalement et ont des faiblesses. Ever accepte de commencer sa vie d'éternelle auprès de Damen et doit apprendre à mieux bloquer ses pensées et découvrir le mode de vie des immortels. Le livre se termine sur un baiser des deux amoureux.

Mon avis :

            Ce premier tome est très bien écrit. L'un des intérêts, selon moi, est que pendant une bonne partie du livre, beaucoup d'indices intriguants concernant Damen sont distillés (comme le fait qu'il boive un remède rouge étrange, qu'il ait énormément voyagé, qu'il ait des connaissances scolaires supérieures à la normale...) et le lecteur hésite : s'agit-il d'un vampire ? Ou est-ce autre chose ? Et comment se fait-il qu'Ever ait de telles particularités ?
            En outre, le roman ne se résume pas à l'histoire d'amour, si singulière, entre Ever et Damen. Le lecteur s’attache aussi au personnage de Riley et aux deux amis d’Ever, Miles et Haven.

Milena Geneste-Mas

04/12/2016

La nuit en jeunesse


herbauts Anne, Que fait la lune la nuit ? , Casterman, 2016, 32 p. 14€95
Anne Herbauts prend, ici, un thème profond de la représentation enfantine du monde. La lune ? Elle fascine l’enfant comme elle a fasciné l’homme premier. La lune qui brille et dont la lumière révèle couleur de la nuit, la nuit noire à laquelle elle doit son existence. Comment, la nuit engendrerait la lumière ! Mais pourquoi, puisqu’elle est le règne de l’ombre, du sombre, de l’obscur ?
La fable d’Anne Herbauts s’identifie aux conceptions de l’enfant : la lune est un être vivant. Et, comme l’enfant, Anne Herbauts s’intéresse non à l’origine de la lune mais à ce qu’elle fait. Tout l’album repose sur un artificialisme dynamique finaliste. La lune trouve en elle-même la raison de son comportement et elle a quelque utilité dont va s’amuser l’autrice. Elle peut s’appuyer, pour cela, sur le langage car, comme le dit Piaget après Charles Bally, « l’expressivité d’une langue est toujours régressive » (1). Le texte s’apparente à un poème en vers libre, jouant des assonances plus que des allitérations, afin de créer un monde éthéré. Bien des hypothèses animistes passent à travers les illustrations qui façonnent l’album vers le mystère. Les couleurs sombres, les silhouettes approchées comme toujours chez Anne Herbauts, une certaine tristesse déridée par certains éclairs de malices, font entrer le jeune lectorat dans un univers indécis mais où il peut s’identifier pourtant, un univers de fabuloseries. Le lectorat est appelé à être attentif : la lune change au cours de la nuit, unité de temps de l’album, dans le ciel unité de lieu. Simple quartier de lune, elle va devenir pleine, mais sans que le texte n’en rien dise. C’est qu’il faut vraiment suivre les images. Lire demande un certain sérieux dans leur traitement. Exigence de l’album que rappelle Que fait la lune la nuit ?. La fin fait référence au mythe de Narcisse, mais plus encore au mythe dont l’anthropologie nous a appris qu’il fut un des premiers construit par les êtres humains, celui de la lune reflétée dans une mare. 
Pour combler l’enfant lecteur, la lune de l’album explique la présence de phénomènes étranges, comme celui de la rosée. Les mots, insérés dans des phrases concises prennent tout un halo de sens que l’enfant peuple hardiment.  Les images, quant à elles, portent ou, aimerions-nous dire, transportent le texte, rendant si aisée sa lecture par l’enfant de tout âge.
Miyakoshi Akiko, Quand il fait nuit, traduit du japonais par Nadia Porcar, Syros, 2016, 32 p. 14€90
Un enfant rentre chez lui aux bras de sa mère. En chemin le père les rejoint. L’enfant est attentif à ce qui se passe derrière les fenêtres des habitations du quartier qu’ils longent. La nuit approche. L’enfant emmagasine tous ces spectacles quotidiens.
Que font les autres quand il fait nuit ? Il se passe quoi la nuit ?
L’enfant est dans son lit, il va s’endormir. Les scènes vues reviennent en désordre, rendant la nuit fourmillante pour le petit être blotti au chaud, au creux de son lit. Les dessins sombres balayés de halos de lumières, comme sous des coups de projecteurs, donnent à l’ensemble de l’album un mouvement cinématographique accentué par la promenade initiale rectiligne dans la rue. La figuration animalière n’est pas sans rappeler, par le grain du papier et les techniques de la couleur et des dessins conjuguées, l’œuvre de Shaun Tan.
Les personnages animaliers sont nettement allégoriques des humains. Comme pour ces derniers, l’espace structure la vie. Le soir venu, chacun se retrouve parce qu’il retrouve un lieu à soi, un for intérieur matérialisé, ici, par la chambre du petit lapin. Akiko Miyakoshi permet de comprendre à l’enfant qu’on se construit soi à partir des autres. C’est tout le travail de la mémoire immédiate de la lecture, convoqué page à page, qui matérialise l’idée. L’enfant qui s’endort construit lui-même un espace où ses rêves vont advenir. C’est cet espace imaginaire qui est mis en scène par l’artiste, un espace où l’enfant amplifie son être de l’interrogation portée sur les autres et des réponses qu’il imagine - comme pour ce personnage lointain entrevu sur un quai de gare en attente d’un train de nuit. Le voyage du sommeil est donc, lui aussi, traversé d’une intimité sociale.
Ecoute dans la nuit, Denolle Christel (conçu avec la collaboration de), illustrations d’Emiri Hayashi, Nathan, 2014, 10 p. 14€90
Les illustrations sont prenantes, d’un bleu profond, couleur dominante rehaussée de traits d’argent. A la fin seulement, la pleine lumière de l’intérieur d’une maison vient rassurer l’enfant face à la nuit. Un dispositif audio-phonique lui permet, à chaque double page, d’actionner un bouton, ce qui provoque la pluie qui crépite, des chats qui miaulent aux étoiles, des grenouilles qui coassent dans la mare.
Marino Gianna, La Nuit des animaux de nuit, Casterman, 2016, 34 p. 13€95
La nuit noire bruit, la nuit noire appelle des ombres, se marie avec la clarté lunaire. Le banal se développe en extraordinaire, l’étrange en fantastique. L’ouvrage en appelle aux sonorités nocturnes, et, à travers les effrois d’animaux, joue la peur du noir de l’enfant. Bien sûr on pourrait parler d’un documentaire joyeux sur les animaux de nuit, ou alors sur la nuit allégorie du règne des bêtes que fuient les humains en quête des lumières de la connaissance. Mais on peut juste y voir un divertissement avec de grands aplats sombres, des formes géométriques et des scènes animalières humoristiques. C’est dans ce foisonnement que se trouve l’intérêt de cet album.

Philippe Geneste