Anachroniques

25/10/2020

La volonté de connaître contre l’asservissement des consciences

 Christopher John, Les Gardiens, traduit de l’anglais par Jean La Gravière, Namur, éditions Mijade, 2020, 255 p.

Deux mondes se font face, deux mondes séparés par une frontière réputée infranchissable. Chaque monde vit dans une bulle, métaphore de la sphère qui enferme, qui interdit l’ouverture, et l’émancipation, comme l’expose si bien le philosophe André Jacob dans son schéma d’anthropo-logique (1). Dans chacun des deux mondes, les relations entre les humains sont imaginaires, les comportements se conforment, et le conformisme n’est-il pas justement cette capacité à rester prisonnier du miroir que la société renvoie à l’individu ? L’éducation, dans l’un et l’autre monde, contribue à ce même but, sous des rituels, des idéaux apparemment différents. Les divertissements étouffent toute prise de conscience, les jeux du cirque dans les cités, la chasse à la campagne :

« Le spectacle est l’idéologie par excellence, parce qu’il expose et manifeste dans sa plénitude l’essence de tout système idéologique : l’appauvrissement, l’asservissement et la négation de la vie réelle » (2)

 Dans ces mondes clos, rien ne sort, rien ne rentre, du moins est-ce la thèse de l’ordre respectif qui y règne. Les infiltrés sont pourchassés, les hors-normes sont éradiqués, physiquement éliminés dans l’un, lobotomisés dans l’autre.

Mais quelques êtres mûrissent en eux leur capacité ancestrale humaine de comprendre l’environnement, de s’approprier le milieu et non de s’y soumettre. Ceux-là ont la volonté, secrètement enfouie, de connaître. Or, de la volonté, il en faut pour qui veut briser le miroir de ces deux mondes qui se réfléchissent : l’un orgueilleux de sa modernité, l’autre fier de son archaïsme conservateur ; l’un celui des cités, à l’architecture futuriste, l’autre, celui de la campagne, figée dans un mode de vie et de gouvernance datant de l’empire britannique à son zénith.

Chaque population est conditionnée à voir l’autre comme une négation de sa propre image, un vide, un néant. Le clivage, entre elles, est entretenu par l’idéologie, chacune cherchant à se protéger de la contamination de l’autre. Alors, oui, il faut que l’ordre règne pour que les images du bonheur, de soi, du social, demeurent stables, ne se floutent pas, ne se lézardent pas. La frontière devient ainsi désirée de chaque côté d’elle-même. Si la frontière cloisonne les deux mondes, à l’intérieur de chaque sphère sociale une division en classes est perpétuée : ouvriers et ouvrières face aux gouvernants invisibles dans les cités ; domestiques assujettis face aux nobles à la campagne.

A la fin du roman, le personnage principal, Rob, un enfant que l’on voit grandir, comprend, après en avoir refoulé la révélation, que le désir de liberté qui l’a poussé à prendre tous les risques pour fuir les cités, le pousse, alors, à fuir le confort du milieu de la noblesse de la campagne. Ce qu’il comprend, c’est que la réalisation de soi n’est possible que par l’effraction pratiquée contre l’assujettissement. Le sujet ne se réalise qu’en en sortant, sinon, l’individu reste individu, citoyen, esclave de la norme.

Ainsi voit-on Rob Randall devenu, après sa fuite, Rob Perrot, s’identifier à son nouveau personnage –l’être social est-il autre chose qu’un personnage ? –, se couler dans les limites que l’imaginaire, individualiste et de classe, de la noblesse a tracées. École et famille ont acculturé l’enfant devenu jeune homme. Ainsi comprend-on grâce à l’action de révoltés, que le pouvoir réel n’est pas détenu par les gouvernements des sphères, mais par un gouvernement occulte à cheval sur les deux mondes et qui les supervise, alimentant les légendes respectives qui les fondent, les histoires qui les divisent, nourrissant aussi, dans les cités comme à la campagne, la fiction d’une guerre des confins pour souder chaque patriotisme assujettissant.

John Christopher dépeint donc un univers où le simulacre domine. Le simulacre, c’est quand la représentation du monde s’englue dans l’apparence, y percevant un réel alors qu’il s’agit d’un imaginaire préfabriqué par un pouvoir transfrontière. S’arrachant à sa captation imaginaire de citadin, Rob s’est englué dans l’imaginaire de la noblesse campagnarde.

Le roman touche alors au nœud qui permettra de dénouer l’intrigue. Pour sortir du simulacre, il faut un tiers. Ce tiers a une figure positive et une figure négative. Figure positive, le tiers est l’ami Mike, ce jeune noble révolté qui a sauvé le fuyard de la famine et de l’emprisonnement. Figure négative, le tiers et la mère de Mike, qui a accueilli Rob Randall mué en Rob Perrot, cette mère favorable aux opérations du cerveau qui anéantissent les volontés de connaissance et de révolte des rares récalcitrants et récalcitrantes. Le simulacre règne, le temps est détraqué, le futur impose sa loi dans une sphère, le passé dans l’autre et seul le pouvoir maîtrise le présent. Pour que l’homme ne vive pas sur Terre en étranger à lui-même, ne lui faudra-t-il pas mettre bas toutes les frontières, et les discours xénophobes qu’elles symbolisent, pour reprendre pied, en toute présence au monde ? Pour, reprenant pied, redonner au présent confisqué (présent éternel de tout pouvoir) son inséparable humaine historicité ?

 Dans ce roman, John Christopher, auteur britannique de science-fiction destinée à la jeunesse, poursuit une réflexion, commencée avec Les Montagnes blanches (1967) et Au-delà des terres brûlantes (1971) –ce dernier quasi contemporain de la première édition de The Guardians–, sur la capacité de l’homme à réaliser la liberté au cœur des sociétés qu’il édifie. Un demi-siècle plus tard, Les Gardiens n’a rien perdu de sa perspicacité sociale. Il s’en trouve augmenté d’une perspicacité historique.

Philippe Geneste

(1) voir en particulier Jacob, André, Esquisse d’une anthropo-logique, Paris, CNRS édition, 2011, 239 p.

(2) Debord, Guy, La Société du spectacle, Paris Champion, 1971 (1ère édition 1967), p.140. Est-il besoin de souligner la contemporanéité de ce texte de Debord et de la parution du livre de John Christopher ?

18/10/2020

Des enfants et des jeux


PETIT Cécile, Je fais mes desserts moi-même sans cuisson, illustrations Elena SELENIENE, Milan, 2020, 96 p. 14€90

Le livre s’attache à proposer des recettes pour les tout petits comme pour les enfants plus grands. Le principe est d’éviter le beurre, le chocolat fondu, la crème chaude. Chaque recette comporte 4 à 6 étapes, chacune illustrée sur une page dédiée. Qu’est-ce qu’on y trouve ? tiramisu au chocolat, tarte aux fraises, mousse au chocolat, bûche de noël, petits roulés fourrés… L’édition est ingénieuse : le livre se transforme en livre-chevalet qui permet aux apprentis pâtissiers et pâtissières de suivre des yeux les étapes du gâteau préparé. Les pages sont pelliculées afin d’être lavables. Bref, un livre qui fera passer un bon moment entre parents et enfants, qui stimulera les enfants à faire la cuisine pâtissière dans des instants partagés de bonheur.

Ainsi, grâce à ce livre bien cartonné qui se transforme donc, si nécessaire, en chevalet, et grâce aux illustrations claires des recettes présentées et avec ces photos d’enfants qui vous ressemblent, à toi et tes amis, tu sauras bientôt fabriquer de « mégas » goûters. Accompagné d’un grand marmiton pour les gestes délicats, comme à l’occasion éplucher des fruits, couper de la pâte d’amende, monter la crème en chantilly, tu vas pouvoir, sans risque de te brûler car ces recettes ne nécessitent pas de feu de cuisson, apprendre l’art de la pâtisserie. La recette de la charlotte de fraises, celle du choco-mousse ou des sucettes fourrées, ni celles, si particulières des palets bretons, des spéculoos et du tiramisu n’auront de secrets pour toi.

En attendant Noël et la bûche poire-caramel, le printemps et la charlotte aux fraises, puis l’été avec les framboises glacées, profite avec tes camarades des après-midis de pluie pour malaxer, façonner, tapisser les moules à cake pour savourer, offrir et partager toutes les recettes de ce livre précieux.

Annie Mas

DENIS Marie-Nina, BEGHYN Benoit, Raconte-nous, 110 cartes pour aider à la narration et développer la créativité, Tom Pousse, 2020, 110 cartes+ livret, 14€

Présenté sous la forme d’un coffret, ce jeu créatif comprend 44 cartes personnage, 39 cartes objet (dans le sens d’objet de l’aventure d’un personnage), 24 cartes décor (endroit où se déroule l’action ou l’histoire) et 3 cartes joker (permettant au joueur d’inventer un personnage, un objet ou un décor de son choix). Avec ces cartes, trois jeux sont disponibles : un jeu raconte-nous un héros ; un jeu raconte-nous une histoire ; un jeu cadavre exquis. Le premier jeu permet de créer un personnage ; le second de créer une narration ; le troisième de créer une histoire collective. On l’aura compris, c’est un moyen ludique pour apprendre à construire un récit. De plus, il peut être utilisé par des enfants comme par des adultes. Chacun des jeux peut se jouer jusqu’à 10 joueurs.

Les trois jeux peuvent se dérouler à l’oral comme à l’écrit. Le livret, très simple, court, permet d’aider les joueurs. Par exemple, pour le jeu 1, un ensemble de questions est proposé et les joueurs répondent afin de construire leur personnage. Le jeu 2 peut s’appuyer sur le jeu 1 ou se faire à part. Il peut aussi s’étoffer par l’ajout de personnages : un qui aide le héros ou l’héroïne, un qui le gêne ou lui met des bâtons dans les roues. Enfin, le jeu 3 se joue à l’oral et chacun improvise sur chaque carte tirée à tour de rôle.

On peut compléter le jeu si on veut, et faire ses propres règles. Bref, ce coffret est un incitateur à la création d‘histoires, il peut être un moyen ludique d’aborder le schéma de narration. Il peut être utilisé en famille, entre amis et aies, être présent dans les foyers socio-éducatifs des établissements scolaires, dans les lieux du périscolaire, dans les classes, dans les CDI. Il peut être utilisé durant les études ou études dirigées. Une belle création de Tom Pousse.

Zamorano Cécile, Je joue, j’apprends l’orthographe, illustrations de Pepillo, Nathan, 2018, livre + cartes à jouer, 12€90

Le petit coffret à destination des élèves du CP repose sur des dessins et des confrontations deux à deux de mots homonymes. La manipulation de cartes à jouer comportant le mot pour répondre à des phrases à trou. Quelques astuces, certaines ficelles anciennes traditionnelles, d’autres plus ancrées dans le domaine des professionnels orthophonistes, complètent la conception de cette livraison. L’orthographe reste, pour les éditeurs, un inépuisable filon de ventes.

Philippe Geneste

11/10/2020

« car sans toi, une chambre froide… »

 

MOESCHLER Vinciane, À Corps parfait, éditions le Muscadier, 2020, 222 pages, 13€50

« Je suis perdue dans un nulle part, un lieu où personne n’a le droit d’exister » … Ainsi, en 1978, s’exprimait Valérie Valère, dans son récit si brillant, si marquant, Le Pavillon des enfants fous. Elle avait alors quinze ans, elle y narrait sa solitude, son écœurement face à la cruauté de l’hôpital psychiatrique où on l’avait enfermée, pour, disait-on, la guérir de l’anorexie mentale dont elle souffrait.  Son univers familial, reflet d’une société mortifère, l’indifférence, le manque de tendresse et de présence, d’attention de sa mère, étaient dénoncés avec rage.

Dans le roman de Moeschler Vinciane, A Corps parfait, Audrey est une jeune fille de quinze ans à la silhouette gracile…  Pour sa nuque délicate, pour un grain de beauté entre ses cheveux relevés, Anton, un camarade de sa classe, assis en cours juste derrière elle, devient amoureux.

Par les voix mêlées de ces deux adolescents, le roman se tisse et vibre tel un accord parfait - et cela malgré leurs différences sociales, elle, issue de parents bourgeois que l’on dirait « bobos », lui, de parents prolétaires et, comme il dit, d’origine « hybride » -.

Audrey a une meilleure amie, nommée Manon, qui vient comme elle de déménager. Toutes deux sont nouvelles dans ce lycée, où Manon se montre à l’aise et chaleureuse, tandis qu’Audrey paraît secrète, solitaire. Mais Manon l’introduit toujours dans le cercle de ses connaissances. Audrey n’a qu’un modèle, sa mère. Journaliste à succès, celle-ci parcourt le monde pour témoigner de la misère humaine en Asie, en Afrique. Mais elle ignore la détresse de sa fille et ses demandes silencieuses de complicité, de présence attentive. Quant au père d’Audrey, il est souvent absent, homme d’affaire au Japon. Mais du Japon, Audrey a retenu la poésie, et écrit des haïkus sensibles, qu’elle égrène en joyaux purs. Jeune fille exigeante pour elle-même, Audrey déteste le désordre et le superflu, tout ce qui semblerait masquer en couches étouffantes un secret, un cauchemar. De son corps lui-même aucune rondeur ne doit dépasser, et à quinze ans elle n’a jamais eu de menstrues. C’est elle, ses parents absents, qui prépare les repas, qu’elle élabore copieux pour son petit frère Tom et pour leur grand-mère venue les garder, et à très basses calories pour elle… lorsqu’elle mange.

Mais bientôt la jeune fille ne peut ignorer le souffle d’un regard posé sur sa nuque, le souffle d’un ailleurs, le souffle de vie d’Anton… Anton, maladroit, hâbleur, plein d’un talent que ne reconnaît pas l’école et qui devient petit à petit « Mon Anton ». Chez lui, les fins de mois sont difficiles et son père, conducteur de métro, a perdu son aura de héros ; sa mère déborde maintenant d’un peu trop de tendresse.

Mais, peut-être, est-ce de l’univers de ses parents que l’adolescent va trouver la force, le courage de parler à celle qui le méprisait un peu, la mère de son amie, afin de déchirer le voile d’un passé étouffant. Seulement après les révélations de sa mère, Audrey pourra guérir, s’autoriser à vivre, à aimer.

En quatrième page de couverture, les éditions Le Muscadier nous laissent imaginer l’autrice de ce roman, Vinciane Moeschler, entourée de chats qui se lovent près de ses feuillets. A nous de les imiter, de nous envelopper dans sa belle écriture, de nous émouvoir de l’histoire d’Audrey et d’Anton, de les rejoindre un peu,

Et avec délices

C’est le temps de nous glisser

Au velours des mots

Mas Annie

 

DISDERO Mireille, Ce point qu’il faut atteindre, éditions le Muscadier, 2020, 188 pages, 13€50

Vanessa Springola a publié en 2019 un récit autobiographique, Le consentement. Il lui a fallu plus de trente ans pour mettre en mot l’emprise qu’un écrivain célèbre a eu sur elle dès ses quatorze ans. Cet écrivain ne se cachait pas et même tirait profit dans ses écrits, dans les médias, de ses actes de pédophile, rendant, ainsi qu’elle le souligne, la société complice et consentante. Enfin, Vanessa Springola démontre qu’à l’emprise sexuelle son prédateur ajoutait une présence abusive, étouffante, jusque dans ses écrits de jeune fille férue de littérature.

Violette a dix-sept ans. Le roman de Disdéro Mireille, Ce point qu’il faut atteindre, vibre de la souffrance de cette jeune fille, meurtrie au plus profond d’elle-même. Violette, elle aussi, aime écrire. Et pour partager ses mots, ses pensées, elle anime, en plus d’un blog personnel -ses carnets de poésie-, un atelier d’écriture en ligne, Pen Touch, dont la responsable et modératrice se nomme Lily de la Lagune. Très vite un homme plus âgé, qui signe Ahriman, vient submerger de conseils et de suggestions les textes de Violette. Thibault, ami de la jeune fille depuis le collège ne supporte pas l’arrogance, la prégnance sournoise de ce faux littéraire. Depuis ce début d’année scolaire, Thibault et Violette éprouvent des sentiments bien plus tendres que leur ancienne camaraderie.

Un jour sombre de novembre, revenant d’une fête donnée par Ahriman en l’honneur de Pen Touch, à Paris, Violette, si chaleureuse avant, devient agressive, ne supportant plus ses camarades. Elle ressent à leur approche, comme une menace : le monde extérieur vient la blesser, la détruire, pareil à des lames aiguisées. Dans ses cauchemars récurrents, enserrant son corps, le glaçant, se dressent les murs d’une chambre froide, où l’on stocke des denrées périssables.

Comment Violette, aux prises d’un prédateur, brise le mystère de cette nuit parisienne ? Comment déjoue-t-elle les manigances de faux amis ? Comment l’amour de Thibault l’aide-t-elle à se reconstruire, à retrouver son intégrité, à soigner les fêlures de son corps et de son esprit ? Comment l’aide-t-il à « atteindre ce point qu’il faut atteindre… pour ne plus jamais reculer » ? Á porter plainte, plus pour retrouver maîtrise de son être, et pour empêcher d’autres viols que par confiance en la justice ? Les réponses sont lovées dans l’entrelacement secret des paroles de Violette et Thibault.

Mireille Disdero vient nous offrir par ces pages un très beau roman polyphonique.

Cette œuvre fait écho à celles de Vincienne Moeschler et de Claire Gratias (1), où la voix sensible de Valentin nous conte l’histoire de son amoureuse, la silencieuse Manon. Dans ces trois romans, les éditions Le Muscadier tiennent la promesse d’offrir des romans de qualité dans l’exigence d’écriture, où témoignages sociaux et références littéraires font œuvre commune…

Quant au titre de cette chronique, il vient de l’émotion devant l’enfant des banlieues, l’élève que méprise son professeur de littérature, Anton, glissant un poème de Paul Verlaine dans le sac d’Audrey… Sans être aimé, rien n’est possible, l’existence n’est que l’ombre d’elle-même, dit le poète. Et sans toi, jeune fille en souffrance, sans vous, lectrices, lecteurs sensibles, le monde finirait par s’assombrir, se glacer, deviendrait… une chambre froide.

Mas Annie

(1) Gratias, Claire, Je voulais juste être libre, Le Muscadier, 2019, 212 p. Cf. le blog du 12 août 2020.

04/10/2020

Sur quelques camarades de l’homme

 « Les enfants devraient apprendre à ne pas traiter les animaux comme des divertissements, mais comme des camarades de l’homme. Ils n’ont pas à en avoir peur, ni à les diriger, ni à être cruels vis-à-vis d’eux. Chaque fois que les individus sont méchants envers les bêtes, on peut suspecter chez eux le désir de dominer ou de brutaliser des personnes faibles. S’il y a des animaux - oiseaux, chiens, chats- à la maison, les enfants devraient s’habituer à les considérer comme des êtres vivants souffrant et ressentant les mêmes douleurs que nous et semblables à nous. Une bonne camaraderie avec eux peut être considérée comme une étape préparatoire à la coopération sociale avec les hommes »

Alfred Adler, L’Éducation des enfants, traduit de l’anglais par D. de Lannoy, préface de Herbert Schaffer, Paris, Payot, 2000, 251 p. –p.165

 

« L’anthropomorphisme n’est pas réductible à la seule projection sur le monde animal de qualités et d’attributs spécifiquement humains, mais est l’indice ou le symptôme discursif de la reconnaissance de l’ancestralité animale des esquisses de ces attributs et qualités »

Tort Patrick, Théorie du sacrifice. Sélection sexuelle et naissance de la morale, Paris, Belin, 2017, 225 p. – p.43

 

Baker Kate, Sur la Piste des bêtes sauvages, illustrations Sam Brewster, Milan, 2018, 24 p. 14€90

Ce bel ouvrage aux pages cartonnées parsemés de volets qui s’ouvrent et se ferment invite le lecteur à découvrir des lieux où s’épanouit encore la vie sauvage : toundra arctique, désert de Sonora, forêt tropicale amazonienne, savane africaine, jungle africaine, zones humides espagnoles, côte sauvage des Hébrides, steppe russe, Himalaya, marais de Bornéo, désert australien, Antarctique. L’ouvrage est instructif, il est ludique. Les illustrations sont à hauteur des jeunes enfants et le format très agréable. Si la découverte des animaux est le point central, la découverte de l’environnement géographique est aussi traitée. Un beau livre.

 

Kirchner Florian, Sauvons les animaux, illustrations de Rémi Saillard, Milan, 2018, 32 p. 12€95

Ce documentaire proposé par la collection Kididoc traite de la baleine à bosse, de l’abeille, du pangolin, de la tortue luth, du corail, du kakapos, du phoque moine, et de bien d’autres encore comme le tuit-tuit, l’orang-outang, le papillon azuré, les écrevisses américaines. Le livre fourmille d’informations sur des animaux de tous les continents. Il contient une bande dessinée, un documentaire s’adressant à l’univers de la consommation. Des pages proposent des éléments de pop-up, des languettes, un jeu, ainsi que des flaps qui mettent en abyme les renseignements.

 

Castrillόn Mélissa, Les Animaux globe-trotteurs, Milan, 2018, 40 p. 15€

C’est un ouvrage très instructif qui traite, par double-page, de la migration de différents animaux : les crabes rouges de l’île Christmas, les gnous, les baleines à bosse, les rennes, les papillons monarques, les éléphants du Mali, les colibris à gorge rubis, les roussettes paillées africaines, les bouquetins des Alpes, le krill arctique, les ours blancs, les gorfous sauteurs, les saumons rouges, les sternes arctiques. L’enfant est invité à s’approprier les informations grâce à un suivi du doigt du trajet de chaque espèce sur une carte imaginaire représentant le milieu où vit l’animal. Le livre ne se concentre que sur l’animal. Mais il permet au lectorat de bien comprendre et la fonction de la migration et ses modalités. En même temps, les enfants découvrent bien des espèces. Un beau livre.

 

Cosanti Francesca, Le Grand Livre des animaux géants – Le petit livre des animaux minuscules, Bayard, 2018, 40 p. 16€90

Un livre, petit, petit, petit, encastré dans un livre, grand, grand, grand ; ça attire, ça attire, ça attire, forcément.

Le grand présente par double page un animal, dix-sept exactement : l’éléphant bien sûr, d’Afrique et de mer, l’autruche et l’anaconda, la girafe et le crocodile, le requin-baleine et le calmar colossal, l’ours polaire et l’hippopotame, le rhinocéros et l’élan, le condor des Andes et le gorille, le poisson-lune et le bison américain, la tortue-luth. Le texte met en avant les caractéristiques du gigantesque animalier avec d’autres informations instructives.

Le petit nous permet de découvrir ces animaux si minuscules qu’ils en deviennent invisibles : la musaraigne étrusque, la mouche drosophile, le ouistiti pygmée, le colibri d’elena, le hamster de Roborovski, le gecko eulepte d’Europe, la puce d’eau, l’antilope dik-dik, l’hermine, le néon cardinalis, la grenouille dorée, le micro-caméléon de Madagascar, la seiche pygmée, la tortue d’Afrique du Sud, l’hippocampe pygmée, le lémurien souris, et enfin le serpent de la Barbade. Soit dix-sept autres animaux que nous connaissons moins bien. Les dessins réalistes sont en couleur, et usent d’avant-plans et de gros plans.

Le plaisir de feuilleter les deux livres inséparables est évident, on y apprend des choses même si l’éditeur fait ressortir le coté record des dimensions. L’exception, toutefois, n’est pas que dans l’immense ; elle est aussi dans le minuscule et cela est nettement un contre-pied à la représentation ordinaire. Un livre à offrir aux enfants à partir de cinq ans jusqu’à 10 ans.

Commission lisez jeunesse & Ph. G.