Quatrome
France,
Shiro et les kamishibaïs, décors et mise en couleurs Manuela, personnages Zad, lu par Caroline Massé, musique et chant par Stéphanie Joire, éditions les Utopiques, 2017, 40 p.
Cd 11’15’’, 24€
Cette création se passe au Japon dont elle met en scène
l’art du kamishibaï.
Il s’agit d’un conte musical. Un
vieil homme raconte des histoires en s’appuyant sur le support des kamishibaïs,
derrière son butaï, petit théâtre de bois, et vendant des beignets de patates
douces. Un enfant, Shiro, aime venir l’écouter jusqu’au jour où disparaît le
vieux conteur. Les récits du vieil homme aux kamishibaïs ne traversent plus
l’air de la rue de leurs aventures.
Shiro grandit. Il est en passe de
rentrer dans la société, travaillant dans un commerce, mettant de sous de côté.
Mais une étrange tristesse l’habite. Or, un jour, il voit, dans la vitrine du
brocanteur du village, le butaï du vieux conteur. Shiro se remémore alors le
temps des histoires du vieux conteur de kamishibaïs, et sa décision est
prise : il se fera conteur. Le conteur est celui qui recueille les
histoires de la bouche des populations du monde, qui les choisit, qui les conte
pour les partager. Le conte est une médiation, il rassemble en son cœur
l’écoute et la diction, l’ouïe et la voix, le conte et la chanson. Il est une
offrande pour auditoire réceptif.
L’album qui accompagne le cédérom
musical composé par Stéphanie Joire, qui met en scène la douce voix conteuse de
Caroline Massé, rassemble les talents de Zad et d’une artiste peintre,
Manuella. Il est propédeutique à la réception. Le livre-CD se fait alors art
total, conte-opéra pour enfants. Au-delà de l’histoire, l’œuvre est une
invitation à prendre le temps, une ode à l’écoute, un poème de la patience
magnifiée :
« les histoires n’aiment rien de mieux que le
temps qu’on leur donne »
« Rien n’est plus beau qu’une histoire,
Une histoire à recevoir ».
Le Chat Botté d’après Charles Perrault, adaptation
Rébecca Stella et Danielle Barthélémy, L’Harmattan, collection Lucernaire,
2015, 52 p. 9€
La pièce propose un Chat Botté pour le vingt-et-unième
siècle. C’et un divertissement théâtral qui n’arrive pas à convaincre vraiment.
Le mélange des références au mode des contes d’une part et au réel d’autre part
ne trouve pas son liage. Il y a, pourtant, de bons passages, de bonnes idées,
une écriture alerte, mais il semble que le récit originel de Perrault ait
plutôt joué comme un empêchement à la création que comme un stimulateur.
Pef, La
ré-si-do-ré du prince de Motordu, musique de Marc-Olivier Dupin, Gallimard jeunesse, 2012, 40 p. + CD, 22€
L’orchestre national d’Île de
France interprète la composition de Dupin qui conte l’histoire faite de
dialogues théâtraux imaginés par Pef. C’est l’histoire d’un orchestre racontée
par des jeux de mots. C’est jubilatoire, insensé, nonsensique et en même temps
c’est une introduction à l’exécution instrumentale des partitions musicales.
Letria Jose
Jorge, Croquemitaine et le rêve, traduction du portugais de Francis
Schurmans revue par l’auteur, L’Harmattan, collection Théâtre des 5 continents, 2010, 36 p. 7€50
Croquemitaine règne sur un royaume
imaginaire d’où il a banni le rêve. Chaque fois qu’un de ses sujets rêve, une
lampe s’allume et le signale aux forces répressives qui viennent le saisir et
l’amener pour interrogatoire devant le roi. Il est interdit de rêver, interdit
de faire rêver. Or, il suffit de penser pour tomber dans la rêverie. Interdire
de rêver c’est donc, aussi, interdire de penser. La hiérarchie déteste la
pensée, celle qui, vagabondant, met un frein à l’obéissance : « Le rêve est le pire ennemi de celui qui
commande et moi, j’aime commander, donner des ordres, être obéi » dit
Croquemitaine. C’est que penser et rêver c’est « voir au-delà de ce que les yeux voient », c’est comprendre et,
de comprendre au désir de désobéir il n’y a qu’un pas. Le cauchemar prend fin
lorsque le monarque, hanté par ses rêves, fuit son propre royaume le libérant
de sa tyrannie.
Très bien écrit, simple d’accès
et profond en réflexions suscitées, parsemé de nombreux clins d’œil
intertextuels, ce texte présente bien des intérêts pour le jeune lectorat à qui
il pourrait être, dans le cadre scolaire, par exemple, proposé pour mise en
scène autant que pour étude.
Philippe Geneste