Anachroniques

28/03/2021

Un art qui contrevient à l’inévitable qui vient

Matières d’Album

Grandin Aurélia, Feuille et Mange-tout, éditions Irfan le label, 2020, 36 p. 15€

Cette fiction est une expérience donnée à vivre par-delà le réel, à travers l’activité imaginaire suscitée. Les protagonistes des contes sont présents : la marraine et la petite fille, l’ogre, les animaux humanisés, la forêt profonde que les personnages vont traverser pour une chasse au bruit. On rencontre aussi le sphinx métamorphosé mais toujours questionneur, comme la baleine de Moby Dick…

On trouve, enfin, la matière de toute littérature : fiction et poésie, mais une poésie non-sensique qui s’allie aux collages illustratifs, aux montages de sculptures, de peintures, de dessins, donc à des sites de représentations occupant chaque double page et fourmillant de détails dans lesquels se plongent les jeunes lecteurs. L’album fait regretter de n’avoir pas sous les yeux la création elle-même. Les personnages empruntent un peu au figuratif, les décors à l’art abstrait, l’ensemble gagne en surréalité.

Les choix des mots reliés entre eux, le choix des matériaux assemblés convoque un réel qui leur répond plus ou moins et d’ailleurs, peu importe, au fond. On le sait, l’effet du collage est de rapprocher des sens tout en en perdant l’appel. Alors, vous direz-vous, qu’est-ce qui importe ? Eh bien, importent les actes créatifs de l’autrice, actes fondés sur des affinités associatives personnelles mais qui provoquent le même mécanisme chez le lectorat. Rêverie verbale et rêverie iconiques suscitent leurs doubles chez les lecteurs.

Écriture et univers plastique se font donc échos, le montage est partout, la figure de l’énumération insiste sur le collage c’est-à-dire sur l’association suivie et libre entre les motifs, les thèmes, les actions plastiques ou scripturales. La cohérence n’est point déclarée, elle est suscitée chez le lecteur qui la tisse. En ce sens Feuille et Mange-tout développe une vraie pédagogie de l’irrationnel. Les personnages sont fantasques, les rêves font irruption sans crier gare et la fantaisie trouve à formuler sa véritable dimension langagière loin des fastes clinquants de l’héroïc fantasy.

Alors, livre des sources que cet album ? Oui. Un livre d’origine de la poésie, un livre d’origine de la raison faite lecture pour construire un à venir de lecture, un livre d’origine contre toutes les autorités et tous les puissants : la liberté se gagne par éternuement, le bonheur par rencontre, la vie par esprit anthropomorphique des amitiés humanimales, l’émancipation personnelle par l’acceptation dissimilante de la phantastiquerie. Les collages et montages hirsutes cachent une composition rigoleuse. Feuille et Mange-tout raconte la fable du monde, soit l’enchaînement des actes qui constituent la trame d’un monde qui est nôtre et nous appelle. S’arbore dans cet album le pur plaisir du premier dire. En effet, la création est offerte non pas comme transmission d’un message mais comme univers immédiat.

Cet album, qui nourrit chez le lectorat une tentation du livre artiste à consulter, soulève la magie d’une création tant plastique, visuelle que scripturale, intellectuelle : le monde se construit par ceux qui y songent et si leur rêve est créateur c’est parce qu’il est né du dialogue entre une créatrice et un lecteur ou une lectrice. Or, naître du dialogue c’est entrer dans une œuvre, non pas participante, mais collective. Dans notre monde tant défait, aux humains dépecés en leurs composantes (compétences), dans ce monde en proie à l’irrationalité de l’exploitation des sols et des êtres, l’art se présente à la barre pour contrevenir à l’inéluctable avenir qui vient. Le choix du collage prend ici une profonde signification, celles des cicatrices, des plaies, des ciselures, des traits, des béances jonctives qui sont traces de l’effondrement autant que des sutures possibles… Le titre nous dit que les inverses -nourriture et avaleur- peuvent se trouver dans une construction d’harmonie, moyennant bien des péripéties. La vie quoi…

Philippe Geneste

Lecture pour tous et toutes

BAILLY-MAITRE Marie-Astrid, L’heure rouge, illustrations de GUILLOPPE Antoine, Tom’poche, 2020, 20 p. 5€50

Cet album est la réédition du volume paru initialement aux éditions l’Élan vert. Travail remarquable sur les ombres, l’apparence, l’interprétation des indices, bref un thriller animalier magnifique. Une hirondelle se transforme au sol en loup, une souris en chouette sous l’effet du soleil en arrière, le loup en lapin, en licorne etc. Après avoir tremblé pour la petite souris, le jeune lectorat découvrira qu’il s’agissait d’un jeu d’amitié entre le loup et la souris.

L’album magnifique par ses aplats et ses jeux qui ressemblent à des ombres chinoises, est écrit avec souplesse, intelligence, poésie. Le texte explicite l’image dont il occupe un espace. Il fournit à l’enfant des éléments pour mieux observer l’image. Ainsi, l’histoire se passe en fin d’après-midi jusqu’à la tombée du jour. Le soleil est toujours présent, mais son image évolue jusqu’à son coucher. C’est sur cette ligne du temps que les scènes sont décrites, que l’enfant va chercher à discerner les transformations des deux protagonistes.

Toute cette intelligence, tant de l’illustration que du texte, de la composition que des couleurs, font de cet album un petit (par le format) chef d’œuvre. Il faut louer le travail, de cette maison d’édition née en 2013 et qui, contre l’air du temps qui sacralise l’immédiat présent, donne une seconde vie, au format de poche, donc à petit prix (5€50), des albums parus chez diverses (une vingtaine) maisons d’édition. Ce travail éditorial apporte une vue historique et critique sur le secteur de l’édition destinée à la jeunesse. Audrey Sauser, à qui nous devons ces renseignements, parle de Tom poche comme d’une maison d’édition « relais ». Dans un louable sens du respect des éditions originales, les illustrations et le texte ne sont pas changés et c’est le format du livre qui s’y adapte.

Philippe Geneste

Merci à Audrey Sauser pour ses réponses à nos demandes


21/03/2021

Qu’est-ce que l’expérience ?

Widmaier Carole, Que nous apprend l’expérience ? illustrations ALFRED, Gallimard, collection Philophile !, 2019, 48 p. 10€

C’est dans les échecs et les réussites que se font les apprentissages. Le sujet les met en cohérence et c’est ce qui forme son expérience. Aussi, le propre de l’expérience est-il de s’inscrire dans le temps. C’est durant ce long processus que le sujet acquiert des connaissances nouvelles qui le font se développer, se tourner vers un hors de soi dont il va se nourrir pour grandir et à qui il va apporter sa part de grandissement : « les événements ne deviennent des expériences que s’ils donnent lieu à une rencontre ».

L’expérience est aussi un risque, le plaisir du risque (Georges Jean) : c’est la « sanction du réel, matériel ou symbolique, qui nous révèle les effets sensibles de ce que nous avons fait et nous conduit à revenir à nous-même, aux intentions qui ont présidé à nos actions ou à nos façons de les mettre en œuvre » écrit Carole Widmaier. Autrement dit, le risque est constitutif de l’humain. On pourrait le nommer le travail du négatif, en ce qu’il éprouve l’équilibre qui nous habite à un moment donné. N’est-ce pas cela que recouvre l’expression figée atteindre ses limites ? Dès lors, paraît évidente l’importance de laisser les jeunes face aux risques de la vie. En effet, aseptiser leur univers les rend dépendants et asservis à tout un tas de tutelles. « Apprendre des expériences suppose de consentir à ce qu’elles me modifient ».

Par l’expérience et ses risques, le sujet acquiert une plasticité, tant cognitive que sociale tout en approfondissant la connaissance de lui-même. L’éducation scolastique, celle de l’enseignement officiel qui domine aujourd’hui, empêche cet épanouissement de la plasticité pour enformer les élèves dans le cadre rigides d’une citoyenneté où -à l’école et au collège notamment- on chercherait vainement la possibilité de droits comme le droit d’expression, le droit d’association…

L’éducation contemporaine, avec le dogme des compétences et de la rationalité numérique des temps d’enseignement et des temps d’éducation, refoule l’expérience juvénile aux marges de son domaine. Ainsi, les compétences des élèves sont-elles attribuées à l’ensemble de la population scolaire avant d’être acquises et il s’agit de les révéler, c’est-à-dire de les voir cochées pour qu’elles soient reconnues présentes… C’est ainsi toute la « démarche d’appropriation » qui nécessiterait l’expérience qui est déniée pour des situations plaquées sur une réalité sans émaner d’un besoin réel. Le savoir est chosifié, réifié dans des colonnes infinies de compétences que nul ne consulte sinon les enseignants obligés et en majorité consentant à les remplir. Le savoir n’étant pas construit au cours d’une expérience de connaissance in vivo, il est abstrait de la réalité de l’élève et de ce fait incapable de devenir une source de modification de l’élève qui se l’approprierait.

Dans cet univers aseptisé, numérisé, le sujet est renvoyé à lui-même. Tout tourne autour de lui. Dans un tel système éducatif, les relations humaines ne sont qu’abstraites et artificielles, sous la chape de plomb des règlements intérieurs des écoles et collèges ou lycées. La coopération est interdite, la vie sociale inexistante, notamment dans les collèges et les écoles. Quelle est donc cette socialisation dont les textes officiels se targuent ? Est-ce l’enseignement de l’éducation morale et civique ? Comment ne pas se rappeler que la socialisation, c’est d’abord une expérience réelle de relations sociales. Si on raye l’expérience coopérative, il ne reste que les relations sous des rapports de force et de dominations diverses chapeautées par l’ordre scolaire. Cette réalité des établissements scolaires inculque ainsi la concurrence, la domination, la compétition dont l’enseignement du « sport » (on ne dit même plus « éducation physique » dans le langage courant de l’école) est le vecteur essentiel. Aussi, si « ce que m’apprend toute expérience, c’est précisément que je n’existe jamais en dehors d’un système de relations », j’apprends à l’école à écraser les autres, j’apprends la souffrance de la domination, de la concurrence dévalorisante. Ce qu’apprend l’école, c’est le goût pour la compétition et le goût de soumettre qui lui est inhérente. Les autres, en est le point aveugle et le harcèlement en est un produit direct, amplifié par les réseaux sociaux : harceler c’est chercher à soumettre. Nombre d’élèves en font l’expérience quotidienne.

Philippe Geneste

14/03/2021

Tout au fond de soi…

JEAN Didier & ZAD, Je n’ai jamais dit, illustrations Régis LEJONC, Utopique, Collection Bisous de famille, 2020, 48, pages 17 € ; Maricourt, Thierry, Leur Fausser compagnie, le chant d’orties, collection Graines d’orties, 2015, 103 p. 14€

Pourquoi Je n’ai jamais dit a-t-il été dévoré par la commission lisezjeunesse ? Parce que ses membres se sont précipités d’abord pour connaître le secret de chacun des vingt protagonistes. La première tentation, irrésistible, celle de se retrouver dans le secret, de rencontrer, comme l’exprime l’héroïne de Leur Fausser compagnie, l’intimité des autres et, en miroir, la sienne. Quel est ce secret ? Une peur inexprimée dans Leur Fausser compagnie, une honte innommable ou que l’on croit telle, mais aussi un rêve, un moment de bonheur intact et qui le restera tel tant qu’il restera secret.

Je n’ai jamais dit met en scène des enfants, des adultes, des vieux, des adolescentes. A lire, deuxième motivation pour relire l’ouvrage, les secrets en lien avec les espaces géographiques d’où proviennent les personnages, il ressort, comme dans Leur Fausser compagnie, que le processus est identique chez tous les humains du monde. La littérature permet cela, d’aller chercher, de trouver et retrouver l’humain sans voyeurisme, sans effraction. Le terme d’humanisme prendrait alors un tout autre sens que le sens idéologique dont il est aujourd’hui recouvert dans un but utilitaire et souvent inavouable.

L’intime ce n’est pas que l’amour, le désir n’est pas que le désir sexuel. Il est élan vers l’autre, il est le signe d’une alter-ation (au sens d’un mouvement vers autrui), il est le signe d’une réalisation de soi grâce à la rencontre d’un autre. Je n’ai jamais dit en fait la preuve. Foin ici des différences de nationalités, de croyances, d’attitude philosophique, d’âge, de civilisation.

De même, dans Leur Fausser compagnie le thème de l’autre est essentiel. L’écriture de Thierry Maricourt, qui sait s’ouvrir, capturer les sensations, retenir l’éphémère d’un sentiment, esquisser des sensibilités, sied à la plongée dans le for intérieur non y enfermant l’héroïne, mais en décrivant son combat pour échapper à ses démons, donc pour s’ouvrir aux autres. Tout le récit ou presque est un monologue de l’héroïne. Mais elle s’adresse d’abord au lecteur puis à Britta, un personnage peut-être fantasmatique, Le ton est identique durant les cents pages du roman, on reste au cœur de la psyché de la jeune héroïne, partageant sa culpabilité sans partager pleinement le secret, et poussé par la volonté de le percer.

Si dans Je n’ai jamais dit le secret est livré comme offrande d’humanité grâce à l’album, dans Leur Fausser compagnie l’autre va paraître d’abord sous la forme de personnages de romans, les livres seront les intercesseurs entre la jeune fille et le monde et ils vont la prendre par la main pour l’accompagner dans ce monde qu’elle redoute, qui l’angoisse et dont elle se sent rejetée.

Ainsi, l’album et le récit œuvrent de concert pour définir la littérature comme un espace médiateur : « Parce que rien n’est vrai dans la vie, sinon on tiendrait pas. (Et rien n’est faux, sinon on jouerait pas » écrit Thierry Maricourt. Si la trame de Je n’ai jamais dit est géopolitique et historique, celle de Leur Fausser compagnie est sociale, reposant sur le fait divers. Dans l’album, le questionnement porte sur la place de la personne humaine au sein d’enjeux qui la surplombent ; dans le récit, le questionnement porte sur la culpabilité ressentie face à des événements traumatisants comme en révèlent les faits divers les plus sordides d’agressions sexuelles. 

Philippe Geneste

07/03/2021

Deux figures féminines en œuvre littéraire

L’Hermenier, Looky, Parada, Siamh, Les Misérables. Cosette, Jungle, 2020, 72 p. 14€95

Voici le second tome de cette adaptation en bande dessinée du roman de Victor Hugo (voir le blog du 31 mai 2020). Il s’agit d’un premier volume, quatre autres sont annoncés. Le scénario a découpé l’œuvre en fonction de l’aventure d’un des personnages. Cosette est, pour la culture française et au-delà, un prénom en héritage pour l’humanité. Cette adaptation vient éclairer pour les générations nouvelles la référence onomastique. L’antonomase « une cosette » est encore vivante aujourd’hui. La fin du tome I laissait le lectorat en attente de la réalisation de la promesse de Jean Valjean faite à Fantine, la mère de Cosette, de s’occuper de sa fille.

En 1831, celle-ci est devenue la Cendrillon du couple ténébreux des Thénardier, aubergistes cruels et véreux à Montfermeil, qui ont poussé Fantine dans la misère et la prostitution, et qui exploitent sa fille sans vergogne. Le tome II est lancé. On y surprend Thénardier, au temps d’avant, voleur de cadavre. On y suit les mésaventures de Jean Valjean. On assiste à son évasion alors qu’il est galérien, on assiste à la traque organisée par la police et le sombre Javert. Le volume nous fait entrer avec Valjean et Cosette, dans la clandestinité du couvent du Petit-Picpus. Il trouve là un complice, le père Fauchelevent sauvé en son temps par Monsieur Madeleine alias Jean Valjean devenu maire d’un petit village. Jean Valjean devient alors jardinier auprès du père Fauchelevent et Cosette va suivre l’instruction religieuse.

Ce tome amène aux élèves la thématique de l’enfance maltraitée, s’appuyant sur le style hugolien pour émouvoir. L’adaptation pointe la responsabilité sociale mais interroge aussi l’âme humaine, pour le dire en des termes conformes à l’œuvre. On retrouve, pour ce faire, l’art de la bande dessinée déjà signalé : nombreux changements des angles de vue, usage fin des champs contre-champs, composition variée des planches avec un jeu riche de cadrages rectangulaires et horizontaux, interventions des gros plans au plus près de l’intensité narrative, précision descriptive des arrières plans.

Comme dans le volume précédent, une annexe de cinq pages interroge le lecteur sur sa lecture, explicite l’inspiration du dessin chez les dessinateurs du XIXème siècle, notamment d’Émile Bavard, éclairage vraiment bien venu car il est rare que les livres ainsi destinés, plus particulièrement, à la jeunesse expliquent les filiations iconographiques.

 

MARSHALL Linda Elovitz, Amoureuse de la nature. L’incroyable destin de Beatrix Potter, illustrations par Ilaria URBINATI, Gallimard jeunesse, 2020, 36 p. 14€90

L’album de jeunesse ne cesse d’élargir son assiette d’intervention. Linda Elovitz Marshall propose une biographie de la créatrice de Pierre Lapin avec des illustrations d’un réalisme poétique et un rien vintage, d’Ilaria Urbinati.

En un espace textuel réduit, des choix étaient à faire. Marshall montre le destin contrarié de peintre et de naturaliste de Beatrix Potter (1866-1943), et ceci à cause de sa condition de femme. Pour ne pas heurter les convenances, elle n’ira pas étudier à la ville contrairement à son frère Bertram. L’épisode du mépris de la Linnean Society est bien raconté. L’autrice souligne la persévérance de la jeune fille puis de l’adulte à s’imposer dans un mode d’hommes. Ainsi, son premier contrat éditorial est-il obtenu parce que l’éditeur croyait avoir affaire à un homme… Elle montre sa volonté d’indépendance financière, son refus de vivre sous la coupe d’un homme. On le sait, elle ne se marie qu’en 1913 et contre l’avis de sa famille à un avocat avec qui elle va réaliser son désir de vivre à la campagne parmi les « fleurs sauvages, les animaux, les champignons, les mousses, les bois, les ruisseaux et la campagne entière » dont les histoires qu’elle invente et le « monde féérique » (1) qu’elle aime se créer sont remplis. Bien sûr, l’album livre l’origine des histoires de Pierre Lapin, Beatrix confectionnant des livrets pour son jeune ami Noel Moore. Enfin, la biographie énumère les acquisitions de terres et de fermes pour préserver la nature de l’urbanité galopante et de l’industrialisation menaçante.

L’album montre que cette interdiction faite aux femmes de prendre des postes dévolus aux hommes par la société patriarcale explique qu’elle se soit tournée vers les enfants. On lui a refusé d’être peintre, elle peindra pour les enfants ; on lui a refusé d’être naturaliste ? Elle racontera aux enfants des histoires naturelles fantaisistes appuyées sur une rigueur d’observation. Et en effet, Beatrix Potter ne simplifie pas ses dessins destinés aux enfants, mais, bien au contraire, porte un soin anatomique dans ses dessins d’animaux qui relèvent de la même exigence naturaliste dans les dessins de la flore.

Le choix de Linda Elovitz Marshall est d’éviter les dates. C’est là une conséquence logique de l’inscription de la biographie à travers le genre de l’album, genre destiné aux petits enfants. Pourtant, l’ouvrage se termine sur une « Note de la traductrice » qui ne s’adresse pas aux petits, mais à des enfants sachant lire. Pourquoi ne pas avoir précisé le contexte historique et les étapes de la vie de Beatrix Potter dans cette note ?

Cette remarque faite, on ne peut que recommander l’achat de cet album pour les enfants et son acquisition par toutes les bibliothèques des écoles primaires et tous les CDI de collège : pour sa beauté, parce qu’il est instruit, parce qu’il ouvre le jeune lectorat au genre de la biographie.

Philippe Geneste

(1) Extrait de son journal cité par Lurie, Alison, Ne Le Dites Pas Aux Grands. Essai sur la littérature enfantine, traduit de l’anglais par Monique Chassagnol, Paris, Rivages, 1991, p.108