Il y a bien sûr les catastrophes naturelles, mais il y a aussi celles que la vie de famille provoque et puis, il y a celles que l’on fomente à l’intérieur de soi, que l’on essaie de combattre, et que parfois on évite parce qu’on en a surmonté les causes. Dans tous les cas, il est bon de mettre en question les catastrophes, afin d’y répondre en conscience, en connaissance des causes, pour le mieux être personnel et collectif. La catastrophe est une question sociale.
FIGUERAS Emmanuelle, Les
Catastrophes naturelles en questions, illustrations de Margaux DUPONT,
Aronne Nembrini, Milan, 2025, 40 p. 9€20
Alors que l’actualité et le
quotidien des jeunes sont traversés par les catastrophes naturelles, voilà un
livre qui fait le point. Les autrices s’adressent aux enfants de l’école
primaire et des classes de sixième et cinquième de collège. Les illustrations
mêlent photographies, dessins, et des pictos réalistes. La volonté est d’être
clair et c’est une réussite. Seize questions structurent l’ouvrage :
Qu’est-ce qu’une catastrophe naturelle ? Depuis quand y en a-t-il ?
Quelle a été la plus grande catastrophe ? Quelle catastrophe a provoqué la
disparition des dinosaures ? Pourquoi la terre tremble-t-elle ?
Comment sauve-t-on les gens pendant un séisme ? Qu’est-ce qu’un
tsunami ? Comment se protège-t-on des catastrophes naturelles ?
Comment les cyclones fonctionnent-ils ? Par quoi les feux de forêt
sont-ils provoqués ? Pourquoi y a-t-il des avalanches ? Un orage
peut-il déclencher un incendie ? Y a-t-il plus de catastrophes avec le
réchauffement climatique ? Qui surveille les catastrophes
naturelles ? Pourquoi les gens vivent-ils près des volcans ?
Chaque question est traitée par
une double page en trois paragraphes accolés à une illustration avec un
pictogramme qui signale le sujet du texte (dégât, histoire, inondation,
énergie, avalanche, volcan, comment ça marche, tempête, métiers, prévention etc.)
Un livre accessible pour la tranche d’âge visée, très
visuel, avec des exemples récents, qui vient informer sur le monde comme il va
mal.
MARTINIÈRE
Damien, Trompe-l’œil, dessins Paul BONA, éditions Jungle Ramdam,
2024, 128 p. 19€95
La
bande dessinée a fait un tabac dans la commission lisezjeunesse des
préadolescents et adolescents. Le dessin stylisé mais sans excès, le travail
des couleurs cherchant le contraste, la saturation, souvent, ne se retenant pas
sur l’invraisemblance, le dessin nerveux, jouant des cadres et des angles de
vue, variant les plans, et, enfin, les portraits où l’humour domine même dans
les situations les plus tragiques, tout concourt à saisir le lectorat du début
à la fin de l’histoire sans pause.
Trompe-l’œil est à la fois un
roman graphique policier à dimension sociale et une suite biographique de
perdants absolument pas magnifiques. Certains sont attachants, tous sont
embarqués dans une voie sans issue, par bêtise pour les uns, par fatalité pour
les autres, par mauvais choix pour d’autres encore. Qu’un des supports de
l’histoire soit le trafic de faux tableaux ajoute à l’intérêt de la lecture
pour l’art pictural… de Paul Bona. Le scénariste Damien Martinière a soigné la
vitesse de son récit, jouant sur quelques itérations, évitant les
rétrospections, s’amusant des rêves d’avenir de certaines héroïnes ou rendant,
par eux, le faussaire attachant.
Et
puis, Trompe-l’œil est un roman familial dont la faillite touche
les sensibilités et nuance même la psychologie de personnages qui n’ennuient
pas le lectorat par leurs introspections intimistes.
Pour
singer l’épigraphe du chapitre 3, quand on peint une grande BD, quoi qu’il
fasse, le lectorat est dedans. Avec cette différence que la bande dessinée
oblige à prendre le contre-pied de l’épigraphe du chapitre 2 : cette
histoire se dit avec les mots qui soulèvent la raison de les peindre, à moins
qu’elle ne se peigne en dessins qui soulèvent la bonne raison de les parler.
JUNG Jinho, 3
Secondes pour plonger, CotCotCot éditions, 2025, 40 p. 17€
Cet
album peut être destiné aux petits. Ceux de la commission Lisezjeunesse se sont
amusés des images à caractère géométrique, qui jouent avec les lignes et les
espaces pour construire un univers saturé d’escaliers, donc de passages et de
voies pour cheminer. Le personnage qui monte au plongeoir les ravira. Et le
plongeon les a fait éclater de rire. Avec eux, la lecture simultanée du texte
ne s’impose pas nécessairement, elle peut très bien attendre la première
découverte complète de l’album. Il est intéressant de voir les petits lecteurs
ou les petites lectrices s’étonner devant les pages réalisées avec de la
perspective, une grande étrangeté pour ces enfants… Les pages qui reposent sur
le jeu des diagonales anticipent sur l’éloignement en profondeur du petit héros
et creusent l’espace, sollicitant chez les jeunes lecteurs et lectrices le
cheminement en cours du petit garçon.
Avec
des moins petits, l’album est le prolégomène au monologue intérieur. Le
personnage se parle à lui-même tout en montant au plongeoir. Il récapitule ses
peurs, les situations qui le mettent mal à l’aise, ses difficultés à l’école…
Durant son périple, il fait quelques rencontres, mais ce n’est que pour
confirmer sa personnalité timide, peu hardie. L’album prend alors une
coloration morale, surtout que l’enfant se trouve enhardi arrivé tout en haut
du plongeoir en compagnie de camarades solidaires qui lui donnent l’envie de
plonger. La solidarité, la socialisation sont les garantes de la réalisation
personnelle du personnage.
Cette
double lecture de l’album est aussi permise par un travail graphique sobre, au
stylo à encre noire pour les contours, au motif des escaliers réalisé aux
tampons de papier et aux couleurs mise à l’ordinateur. Cette sobriété
s’accompagne d’une grande douceur qui sied au personnage qu’on imagine ne pas
aimer être brusqué. Et c’est aussi le propos de l’album tenu sans didactisme à
partir de la situation où le personnage s’incorpore. Douceur, sobriété, 3
Secondes pour plonger est un album qui soulève un rejet de la
compétition et de la concurrence : « Mais, moi, gagner, ça ne
m’intéresse pas, parce qu’alors quelqu’un doit perdre. » C’est à
nouveau le point de vue de l’autre qui vient étayer le point de vue personnel.
Philippe
Geneste