ARROU-VIGNOD Patricia et Jean-Philippe, Héros, 40 personnages de roman, illustrations d’Andrew LYONS, Gallimard jeunesse, collection Bam !, 2021, 42 p. 12€50
En
2012, Gallimard jeunesse avait déjà fait paraître, sous les plumes de Anne
Blanchard, Jean-Bernard Pouy, Francis Mizio et Serge Bloch, L’encyclopédie
des héros, icônes et autres demi-dieux, qui en 124 pages explicitaient
les origines, le contexte culturel qui avaient vu naître les figures choisies,
à la découverte des actions qui leur valent d’être restés dans la mémoire
collective. Le livre de P. et J-P. Arrou-Vignod est différent. Il ne concerne
que les héros de la littérature depuis l’antiquité jusqu’à nos jours, de
Gilgamesh à Tobie Lolness, de Renart jusqu’à Lyra, de Don Quichotte jusqu’à
Croc-Blanc, de Jane Eyre à Nils Holgersson etc. Chacun de ces vingt
personnages est présenté en une double page par sa carte d’identité, un
argument de sa présence dans le roman qu’il traverse, une contextualisation de
l’histoire, une brève citation, et une image du héros ou de l’héroïne commentée
avec pour légende une caractéristique mise en valeur.
L’ouvrage
de format de poche propose ainsi un portrait qui invite le jeune lectorat à se
plonger dans le livre racontant l’histoire de ces êtres imaginaires. Les
personnages en effet « sont nos véhicules ; c’est grâce à eux que
nous entrons dans un récit » (1). C’est que le héros qui entre dans la
vie des lecteurs, celui ou celle qui inscrit ses pas dans la mémoire d’un
peuple ou de différents peuples, est un être imaginaire qui a pris une
consistance littéraire telle qu’elle se transforme en consistance sociale. Le
personnage, qui assume une fonction précise dans le récit qui le soutient en
vient à sortir de cette fonction soit par l’identification à son image du jeune
lectorat, soit parce que, tel Cosette, il est transcendé par les sentiments
qu’il provoque, sentiments qui se muent parfois en valeur sociale de tout un
peuple, d’une classe sociale ou d’un groupe. C’est pourquoi les héros sont des
vecteurs de représentations sociales. Ils peuplent les mythes et les légendes ;
les religions se sont ingéniées à en créer pour enrôler les populations.
La
lecture de Héros… mène à distinguer le héros ou l’héroïne et le
personnage. Les deux premiers se situent en dehors de l’humanité commune, alors
que les seconds lui appartiennent ; les deux premiers s’identifient à un
système de valeurs (voir les super héros des films de la culture de masse
produits par l’industrie américaine du divertissement), alors que les seconds,
parfois, peuvent déborder leur fonction dans le récit tout en s’abstrayant du
système de valeurs dominant. Or, si on tient compte de cette distinction, la
lecture du livre montre que les héros de l’antiquité et, en partie, du Moyen
âge, comme ceux de la fin du vingtième siècle et du début du vingt-et-unième
siècle sont hors du commun, alors que la littérature de jeunesse à partir des
années 1960/1970 a révélé des personnages. Bien sûr, cette remarque est fragile
car il faudrait élargir le corpus et vérifier aussi l’hypothèse qui la fonde de
la différence entre héros/héroïne et personnage. Toutefois, Jean-Philippe et
Patricia Arrou-Vignot sont suffisamment instruits de cette littérature et de
son historique pour qu’on puisse prendre au sérieux leur livre, au-delà de
l’intérêt immédiat pour le jeune lectorat.
Philippe
Geneste
(1)
Arrou-Vignod Jean-Philippe, Vous écrivez ? Le roman de l’écriture,
Gallimard, 2017, p.68 (voir le blog du 6 mai 2018
Le
NEOUANIC Lionel, Je suis un personnage !, rouergue, 2021,
240 p. 17€
240
pages, 116 entrées, pour instruire le lectorat sur la notion de personnage.
Tout commence par savoir ce qu’est un personnage, et savoir qui n’en est pas
un. On va parler de héros ou d’héroïne, certes, mais aussi des personnages
secondaires, des faire-valoir, des personnages de passage. On va évoquer des
personnages connus mais aussi une foule d’inconnus.
Le
Néouanic interroge ainsi de nombreuses situations qu’il invente ou qu’il
évoque, avec une profusion de dessins humoristiques type fanzines et comics.
C’est drôle, et le livre peut se lire comme de mini-biographies de personnages
d’un univers nonsensique, ubuesque ou surréaliste. On y croise, évidemment, les
personnages symboles de telle ou telle émotion, des comportements, des objets,
des animaux, des humains, des éléments du cosmos… On y croise, aussi, des
personnages à la vie intérieure chargée.
Bref,
le livre de Lionel Le Néouanic fait feu de tout bois. Sa lecture peut être
jubilatoire ; mais qu’en retire le jeune lectorat ? Est-il fait pour
lui, au fond, ou bien pour des animateurs ou animatrices d’ateliers
littéraires, des enseignants ? Le livre peut inciter à prendre la plume,
ou tout simplement à se créer son propre personnage : « Toi, moi,
nous… Tous, pouvons être personnages » en toute empathie…
Philippe
Geneste & Annie Mas
FERRETTI
DE BLONAY Francesca, Ulysse, l’odyssée des mers, illustrations OYEMATHIAS,
Nathan, 2021, 12 p. 9€95
Suivant l’épopée
attribuée à Homère dans L’Odyssée, le livre dépliant propose à un plus jeune
lectorat la carte légendée qui suit le périple du héros roi d’Ithaque. Nous
sommes en Grèce en 1200 avant Jésus-Christ. Ce livre est un riche document,
varié, où on trouve des informations sur les dangers de la navigation, sur la
science de la cartographie, sur l’apport de l’archéologie à la connaissance de
la ville de Troie, sur Homère, avec un résumé de L’Odyssée. Un livre
apprécié par la commission
Commission lisez jeunesse